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6606. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE KNYPHAUSEN A PARIS.

Knyphausen berichtet, Paris 3. Januar: „L'armement dont j'ai fait mention l'ordinaire dernier, est réel, et l'on a travaillé avec tant de promptitude qu'on a donné ordre au port de Lorient d'envoyer à Brest tous les ouvriers qui ne seraient pas absolument nécessaires pour le service du port. M. Rouillé, avec lequel je me suis entretenu à ce sujet, m'a avoué qu'il était vrai qu'on armait des vaisseaux, et qu'après avoir temporisé longtemps et donné à l'Angleterre des preuves manifestes du désir qu'on avait de conserver la paix,1 sans que tout cela eût fait aucune impression sur elle, la prudence semblait dicter ce parti; que cet armement n'avait aucune destination jusqu'à présent, qu'on voulait seulement être prêt à tout évènement, et que les circonstances décideraient de son emploi; que, d'ailleurs, comme l'Angleterre mettrait en mer une escadre considérable, il était naturel qu'on ne demeurât point ici les bras croisés, et qu'on se mît à portée de parer les coups que cette puissance pourrait porter. En attendant, cet évènement excite une grande surprise en Angleterre … Le Roi n'a nommé personne jusqu'à présent pour le commandement de l'escadre ni pour celui des troupes qui y seront embarquées, mais le nombre des vaisseaux qu'on arme, monte, à ce qu'on assure généralement, à vingt, et l'on croit que ce sera M. de La Galissonerie qui en aura le commandement.“

Berlin, 18 janvier 1755.

J'ai reçu votre dépêche du 3 de ce mois. Les particularités y comprises touchant l'armement que la France fait faire pour ne point être prise à dépourvu, si les Anglais mettent en mer quelque escadre considérable, sont aussi singulières qu'on n'en peut présumer autrement, sinon que la guerre entre ces deux puissances en arrivera. Bien que je souhaite que leurs différends puissent être conciliés amiablement, je crains cependant pour les suites, mais, supposé le cas de guerre entre l'Angleterre et la France, et qu'elle serait inévitable, j'estime, si j'ose le dire, qu'il vaudrait mieux que cette guerre existât dans le moment présent où la cour de Vienne est dans de fortes appréhensions au sujet de l'évènement de la mort du Sultan, qu'à un autre temps que l'Autriche aurait les bras plus libres pour faire des diversions à la France.

Quant à la petite guerre entre les parlements de France contre les évêques,2 je crois qu'elle tombera de soi-même, dès que les Français seront occupés par des choses plus sérieuses.

Au surplus, je vous recommande d'exécuter, avec toute la dextérité qu'il vous sera possible, ce que je vous fais enjoindre par le postscriptum de la dépêche d'aujourd'hui du département des affaires étrangères.3

Federic.

Nach dem Concept.



1 Vergl. Bd. X, 509.

2 Vergl. Bd. X, 431.

3 Weisung an den Gesandten, dem Minister Rouillé vorzustellen, dass mit dem Ableben des Sultans und bei der Ungewissheit des wiener Hofes über die künftige Politik der Pforte der geeignete Moment gekommen scheine (vergl. Bd. X, 509), durch Aubeterre eine Einwirkung auf den wiener Hof im Interesse baldiger Regelung der preussisch-österreichischen Handelsbeziehungen zu versuchen.