7020. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A VIENNE.

Potsdam, 7 octobre 1755.

J'ai reçu votre rapport du 27 de septembre. Observez de déchiffrer vous-même et seul tout ce qui suit. Je crois être à présent à même de vous indiquer les raisons de la mauvaise humeur de la Reine-Impératrice et de son ministre, le comte Kaunitz, qui a éclaté depuis l'arrivée du dernier courrier de Londres;326-7 il s'y est agi, sans doute, des nouvelles que nous venons de recevoir de Londres,326-8 en conséquence desquelles, depuis le retour du Roi, les ministres ne savent point s'accorder sur ce qu'ils doivent faire dans les circonstances présentes. Il<327> y en a qui voudraient qu'on rompît incessamment avec la France ouvertement, soit en proclamant la guerre, soit en publiant des représailles, au lieu que les autres voudraient préalablement voir si la France ne remuerait pas à la fin d'elle-même, vu qu'en attendant que les vaisseaux de guerre continuassent à faire des prises sur les bâtiments français,327-1 il importait peu, dans le moment présent, de déclarer la guerre à la France ou non, pourvu que cela se fît avant l'ouverture du Parlement. Ces divisions qui continuent encore, ne sont pas seulement la cause de ce qu'on ne prend pas là de résolution, mais ont encore donné sujet à un changement dans le ministère, puisque le roi d'Angleterre vient de jeter les yeux sur le sieur Fox, pour le nommer secrétaire d'État à la place du sieur de Robinson, qui quittera entièrement le ministère, et que, d'ailleurs, le sieur Fox aura la direction des chambres des communes327-2 et, par conséquent, le plus grand secret de l'État; changement qui ne saura que déplaire souverainement au duc de Newcastle,327-3 qui voudrait conserver toujours une supériorité décidée dans les affaires, mais qui sera obligé ou de partager son pouvoir avec le sieur Fox ou de quitter le ministère. L'on ajoute que ce changement entraînera d'autres encore, et, comme tous ceux qui cherchent de culbuter le duc de Newcastle, étaient des partisans outrés de la guerre,327-4 l'on devait s'attendre qu'elle serait poussée avec la dernière vigueur.

Mais ce qui peut mortifier plus que tout cela la cour où vous êtes, c'est que, le chevalier Williams ayant envoyé à Londres le traité qu'il a signé entre la Russie et l'Angleterre, on n'a pas voulu le ratifier, tant par des pointillés du cérémonial où ledit Williams a failli, que par des clauses que la cour de Londres a réputé artificieuses, que les ministres de Russie y avaient mises,327-5 de sorte que l'on est à présent fort piqué à Londres contre la cour de Pétersbourg et très mécontent du sieur Williams, auquel on a ordonné que, pourvu qu'il ne saurait remédier à tout ce que la cour de Londres ne trouvait à sa convenance, il ne devait plus en parler et rompre la négociation, le Roi et son ministère ne voulant rien plus faire pour ramener ce traité à sa consistance, et qu'on s'en consolera, supposé que la négociation échouerait.

Voilà des particularités sur lesquelles vous pouvez tabler. Au reste, je vous en ordonne le dernier secret, de sorte que vous n'en devez faire communication de la moindre chose à âme qui vive.

Federic.

Nach dem Concept.



326-7 Vergl. S. 322.

326-8 Berichte Michell's, London 23. und 26. September. Vergl. Nr. 7019.

327-1 Vergl. S. 323.

327-2 Vergl. S. 5.

327-3 Vergl. S. 5.

327-4 Vergl. S. 128.

327-5 Vergl. S. 329. Anm. 1.