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lieu que les pourparlers qu'il a eus depuis quelque temps avec ce ministre, sont relatifs à la négociation entamée en 1749 par le comte de Kaunitz, à laquelle on n'a point voulu prêter l'oreille dans ce temps. M. Rouillé, que j'ai encore sondé à ce sujet, m'a réitéré1 de la façon du monde la plus affirmative qu'il n'y avait aucune négociation entre sa cour et celle de Vienne, et il a même ajouté qu'il était impossible qu'il pût jamais y avoir entre elles une certaine intimité, vu l'opposition invincible qu'il y avait entre leurs intérêts. Après quoi, il m'a fait entendre encore que l'envie que sa cour manifestait de resserrer les liens qui l'unissaient à Votre Majesté, et dont la nomination de M. de Valory fournissait une nouvelle preuve, suffisait seule pour contredire un pareil bruit. Quelque positives que soient ces assurances, j'ai cependant des indices si puissants du contraire que je crois qu'il serait téméraire d'y ajouter foi, et il me semble que Votre Majesté ne saurait mieux faire que de S'en expliquer envers M. de Nivernois et d'exiger que sa cour La rassure contre un pareil soupçon. Au reste, j'ai tout lieu de présumer, et il m'a même été assuré de fort bon lieu que la négociation du comte de Starhemberg n'a pour objet ni l'élection d'un roi des Romains, ni la neutralité des Pays-Bas, ni aucune proposition de mariage, et qu'elle ne porte que sur des choses générales, qui sont le désir qu'a l'Impératrice-Reine de vivre avec la France dans la plus parfaite intelligence et de pouvoir détruire les préjugés qu'on a eus jusqu'à présent sur l'incompatibilité des intérêts de la maison de Bourbon avec celle d'Autriche. Mais j'ignore quels sont tas avantages qu'il a ordre de proposer à la France en faveur de l'établissement d'une pareille alliance, et il y a apparence qu'il ne s'en est expliqué jusqu'à présent que très vaguement … Il transpire depuis quelques jours qu'on se propose de former incessamment un camp considérable dans la Flandre française et de faire beaucoup de mouvements de troupes dans cette

Je me suis expliqué avec le duc de Nivernois sur la négociation de sa cour avec celle de Vienne, qui m'a dit qu'il y avait déjà quatre à cinq ans que la dernière avait fait des avances pour voir s'il n'y avait pas à moyenner une intimité entre les deux cours, sur quoi la France avait répondu en termes honnêtes et polis, sans cependant vouloir entrer jamais en rien. Il peut être que dans le moment présent les Autrichiens ont renouvelé les mêmes propositions, mais de savoir sur quoi elles sauraient rouler, c'est ce qu'il faut que j'avoue que j'ai bien de la peine à deviner. En attendant, c'est une chose sûre et que mes dernières lettres de Vienne m'ont confirmée encore, que le comte d'Aubeterre évite au possible de parler à mon ministre Klinggräffen et qu'il a dit à quelqu'un : « Si le roi de Prusse ne veut pas de nous, il faut que nous cherchions d'autres alliés; »2 ce qui tout m'inspire de certains soupçons.

Ce que vous me mandez du dessein qu'on a pris d'assembler incessamment un corps nombreux de troupes dans la Flandre française, m'embarrasse plus que tout le reste, puisqu'il n'y a pas moyen d'accorder ceci avec tout ce dont nous [sommes instruits d'ailleurs]; voudrait-on entrer avec ce corps dans les Pays-Bas hostilement, tandis qu'on négocie à Vienne? ce qui est hors de toute vraisemblance. En défaut de cela, voudrait-on en



1 Vergl. S. 162.

2 Klinggräffen berichtet, Wien 28. Februar: „Je suis informé que quelqu'un lui [au comte d'Aubeterre] a dit dans la conversation: « la France sera toujours, malgré la convention [de Westminster], liée avec Sa Majesté le roi de Prusse, » et qu'il a répondu: » on ne peut à la fois être et à l'un et à l'autre.&171;.“