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Je ne connais que trop la faiblesse du ministère de France, je sais leur grande envie pour regagner la paix, et combien il est éloigné de prendre une résolution vigoureuse, comme aussi de rendre la guerre générale.

Je me suis d'ailleurs entremis pour leur porter des propositions tendantes à un raccommodement avec l'Angleterre; quoique j'aie d'abord cru qu'elles ne seraient pas encore suffisantes, néanmoins le susdit ministère a pris de très bonne part ma démarche faite à ce sujet.1

J'ai donc toute la peine au monde de croire que les Français voudraient se brouiller entièrement avec moi et entrer dans une guerre générale, qui serait diamétralement opposée à leurs intérêts.

Malgré tout cela et toutes les terribles oppositions qu'il y a du côté des intérêts des deux cours respectives, trop différentes pour se lier ensemble dans la conjoncture présente, il est très nécessaire qu'on ne se relâche point d'attention pour pénétrer et pour approfondir ce que la cour où vous êtes voudrait tramer, et si son orgueil l'emporte si loin qu'elle voudrait faire par dépit une démarche contre l'Angleterre qui fût directement contraire à ses propres intérêts les plus essentiels.

Au surplus, je veux bien vous informer, quoique encore pour votre seule direction, que, selon mes nouvelles,2 la cour de Londres va envoyer des ordres au sieur Keith pour faire expliquer nettement le ministère autrichien sur toutes ses menées actuelles et pour lui faire remarquer que, si ses intentions étaient nettes pour la conservation de la paix de l'Allemagne dans la crise présente, il devait applaudir à la convention de neutralité de l'Allemagne conclue avec moi, et qu'il faudrait enfin que ledit ministère s'expliquât catégoriquement là-dessus, et qu'au reste le sieur Keith aurait ordre d'en parler confidemment avec vous. J'ai voulu vous avertir préalablement de ceci, afin que vous en soyez informé, quand le courrier portant ces ordres arrivera au sieur Keith, et que, d'abord qu'il les aura exécutés, vous puissiez m'informer incessamment de la réponse que le ministère autrichien y aura faite.

En attendant, vous continuerez d'avoir toute l'attention sur les mouvements des troupes,3 et principalement sur ceux qu'on va faire avec la cavalerie en Hongrie, et du reste sur l'humeur que la Reine-Impératrice et son ministre, comte de Kaunitz, font apparaître.4

Federic.

Nach dem Concept.



1 Bericht Knyphausen's, Paris 5. März. Vergl. Nr. 7355.

2 Bericht Michell's, London 5. März. Vergl. Nr. 7354.

3 Vergl. S. 165. 166.

4 Vergl. S. 188.