<388> guerre en Allemagne. En second lieu, et au cas qu'il n'y ait plus moyen d'empêcher la défection de la Russie, de nous rendre incontinent, le roi d'Angleterre de son côté et moi du mien, aussi formidables, par des levées de troupes, par des subsides etc., que les forces et la situation de chacun de nous le permettent, afin que nous soyons en état de nous opposer vigoureusement l'année qui vient aux entreprises de l'ennemi. Et comme d'ailleurs il faudra nécessairement songer à des diversions à faire contre un ennemi qui nous attaquera avec des forcés si grandes et supérieures, dans le cas que la Russie se déclare pour la France et l'Autriche, il n'y aura de reste aucun moyen plus efficace que d'employer les Turcs pour faire la diversion.

Ce sont mes sentiments, que j'abandonne cependant au jugement et à la pénétration du roi d'Angleterre et de son ministère, pour aviser s'il y a d'autres moyens convenables pour prendre un meilleur parti. Mais, supposé qu'il n'y en ait point et qu'il faille recourir à la Porte Ottomane, je crois qu'alors il ne faudra pas tarder de mettre les fers au feu, vu le grand éloignement des deux États et les circonstances qui accompagnent une telle négociation, afin que, dans le cas que la Russie manquât à l'Angleterre, elle sache compter sûrement sur les Turcs.

Il y a encore une chose sur laquelle je souhaiterais que les ministres voulussent me dire nettement et sincèrement leur sentiment; c'est que si, à l'évènement que la Russie prît parti avec la France pour agir contre moi, afin de ne pas pouvoir mettre obstacle aux Français d'envahir l'Hanovre, je pourrais compter alors que l'Angleterre enverrait une flotte dans la Baltique. Sur quoi, je souhaite seulement de savoir leur intention et jusqu'où ils sauraient aller ou non en ceci, afin de pouvoir prendre mon parti là-dessus.

Au surplus, je ne veux point recommander le dernier secret sur tout ceci, tant à M. Mitchell qu'aux ministres d'Angleterre, étant assuré qu'ils me le garderont religieusement pour leurs propres intérêts.

Quant à ce que le ministère anglais demande par rapport aux insinuations à faire de ma part à la république de Hollande,1 pour se mettre en état de défense en augmentant ses forces, vous direz à M. Mitchell que, quelque bonne volonté que j'aie pour m'y prêter, je n'avais cependant aucun parti, ni engagement avec ceux qui sont du parti stathoudérien, ni avec ceux qu'on nomme le parti pacifique; mais que, si le ministère croyait être de quelque utilité, quand je donnerais des instructions à mon chargé d'affaires à la Haye, pour aller de concert avec le ministre anglais qui y réside, je le ferais avec bien du plaisir.

Vous ne manquerez pas d'expliquer tout ce que dessus à M. Mitchell, et vous devez même lui laisser lire tout au long cette lettre et lui permettre de s'en faire une note ou extrait, afin d'en informer au plus tôt



1 Bericht Michell's, London 28. Mai. Vergl. Nr. 7551.