<96>

me tont soupçonner qu il est question de quelque négociation secrète entre ces deux cours. Je n'en ai point pu pénétrer l'objet, mais je ferai tout ce qui pourra dépendre de moi, pour tâcher de me procurer à ce sujet des notions sûres et précises. Plusieurs personnes soupçonnent que ce ministre est chargé de faire des ouvertures à la France de la part de la cour d'Angleterre. D'autres supposent que Sa Majesté Impériale pourrait bien avoir offert sa médiation pour travailler à la conciliation des différends qui subsistent entre ces deux cours. Je ne saurais assurer à Votre Majesté jusqu'à quel point ces conjectures peuvent être fondées; mais il est certain que j'ai tout lieu de supposer qu'il y a quelque chipotage secret entre cette cour et celle de Vienne dont on ignore généralement l'objet.“

tinctement avec eux. Quant donc à la question du droit, on est obligé de convenir que mon traité avec la France est purement et simplement défensif et nullement offensif;1 que, de plus, je n'ai garanti par ce traité à la France que ses possessions en Europe, où elle n'a point été attaquée, et que ses possessions indiennes ont été exclues dans le traité, où cependant les hostilités se sont commises. Ainsi le ministère ne saurait étendre le traité contre ses stipulations expresses et ne pas prétendre ma garantie sur des possessions qui y ont été exceptées, aussi que je ne saurais prétendre la garantie de la France sur des choses qu'elle ne m'a jamais garanties. Argument sur lequel vous devez bien appuyer.

D'ailleurs, le roi d'Espagne,2 qui est dans de plus grandes liaisons avec la France que moi, n'est-il pas resté neutre dans les troubles présents, de sorte qu'il ne se mêle de rien et laisse agir librement les Anglais dans l'Amérique? comment veut-on donc prétendre des choses à moi auxquelles je ne suis nullement obligé, et peut-on se trouver offensé, quand je prends des arrangements indispensables pour ma propre sûreté, et qui d'ailleurs ne lèsent la France en aucune façon, mais qui empêchent plutôt que la France ait 60,000 Russes et peut-être autant d'Autrichiens moins d'ennemis et que la guerre ne devienne générale?

Pour ce qui regarde le mécontentement que M. de Rouillé vous a fait remarquer de ce que je n'avais pas plus tôt annoncé à la France les propositions que l'Angleterre m'a fait faire à l'égard de la neutralité de l'Allemagne, [vous lui direz] que cette négociation n'a été proprement entamée et conduite que depuis le mois de novembre,3 et que ce n'est pas de ma faute que le duc de Nivernois n'a pu arriver plus tôt ici;4 au surplus, ce n'est pas une raison pour prétendre que je doive sacrifier mes intérêts indispensables, parcequ'on m'a envoyé un duc et pair de France.

Quant aux autres reproches que M. de Rouillé m'a voulu faire, je veux bien vous dire que je serais à même d'en faire de plus forts sur



1 Vergl. S. 49.

2 Vergl. S. 72. 73.

3 Vergl. Bd. XI, 418. 419.

4 Vergl. S. 73.