7255. AU LORD MARÉCHAL D'ÉCOSSE A NEUFCHÂTEL.

[Potsdam,] 8 février [1756].

Ne m'accusez point de paresse, mon cher Milord; j'ai été si prodigieusement occupé depuis un temps — vous jugez bien de quoi — qu'il m'a été impossible de vous écrire; l'agitation dure encore, et il faudra bien un mois pour que je puisse regagner la tranquillité propre à notre correspondance. Je ne vous en ai pas moins d'obligation des<91> graines de melon que vous avez eu la bonté de m'envoyer, ainsi que de la doctrine tolérante que vous vous efforcez d'introduire dans votre gouvernement. Ce serait couronner l'œuvre, que de faire réussir cette loterie dont personne ne veut. Je crois qu'il faut être dissipateur et prodigue pour avoir du crédit; je vois que cela réussit partout; il faudra imiter les autres.

On menace votre gouvernement de Voltaire, d'un tremblement de terre, de madame Denis et d'une comète; il ne faut qu'un de ces fléaux pour tout détruire. J'espère qu'il en sera de ces conjectures comme de bien d'autres. On a prophétisé à peu près les mêmes malheurs à la reine de Hongrie; j'en excepte Voltaire. Elle a indiqué des jeûnes, des prières; on expose le venerabile à Vienne.91-1 Sans doute qu'après cela le bon Dieu y pensera plus d'une fois, avant que d'entamer l'Autriche. On vous dira sans doute, mon cher milord, que je suis un peu moins Jacobite que je ne l'ai été; ne me prenez point en haine pour cela, et soyez persuadé que je vous estime toujours également. Adieu.

Federic.

Nach dem Abdruck in den Œuvres de Frédéric le Grand XX, 260.



91-1 Vergl. S. 29.