7450. AU SECRÉTAIRE MICHELL A LONDRES.

Potsdam, 24 avril 1756.

Je n'ai point reçu de vos nouvelles par l'ordinaire dernier. En attendant celles que vous me ferez, j'ai bien voulu vous informer, quoique pour votre direction seule et sans que vous en laissiez apparaître quelque chose aux ministres anglais, que, selon mes dernières lettres de Vienne,288-4 le sieur Keith a remis aux ministres de la cour impériale copie in extenso de la convention de neutralité faite entre l'Angleterre et moi, avec des assurances qu'ils verraient par là l'innocence de cette convention et la pureté des sentiments du Roi son maître, qui ne tendaient qu'à la tranquillité si salutaire dans l'Allemagne; mais qu'au reste il n'avait point été question encore de faire expliquer la cour de Vienne sur son chipotage avec la France,288-5 et que le sieur Keith avait dit à mon ministre à ladite cour que son courrier ne lui avait rien apporté outre l'ordre de communiquer la convention.

Après ceci, je veux bien vous informer d'une autre nouvelle qui m'est parvenue du depuis de très bonne main,288-6 c'est que le ministre<289> de Russie à Vienne, le comte de Keyserlingk, avait reçu l'ordre de sa cour d'informer celle de Vienne que le ministre de la Russie à Londres avait été chargé de déclarer au ministère anglais que sa cour avait reçu avec beaucoup d'étonnement la nouvelle de la convention faite entre l'Angleterre et la Prusse, qui lui avait paru d'autant plus extraordinaire qu'elle s'était faite sans une communication préalable avec les deux cours impériales; mais que celle de Russie espérait toujours que l'Angleterre se convaincrait toujours davantage de la nécessité d'un concert si souvent proposé plus étroit et plus positif entre elle et les deux cours impériales, et que le sieur de Golyzin avait reçu ordre d'accompagner ceci avec toutes les représentations convenables pour obtenir ce but, et qu'au surplus il devait presser les ministres anglais qu'on payât des subsides à la Saxe.289-1 Que pour le comte Keyserlingk, il lui avait été enjoint de représenter à la cour de Vienne combien il serait nécessaire qu'elle fît tenir le même langage à Londres par son ministre et qu'elle l'instruisît en conséquence. A quoi, le susdit comte Keyserlingk, en s'acquittant des ces ordres, avait ajouté, comme du sien, que mes nouveaux engagements avec Sa Majesté Britannique ne seraient pas un obstacle au susdit concert, qu'il en arriverait de deux choses l'une, ou que je quitterais l'Angleterre, et en ce cas le fruit et l'effet du concert en question serait toujours celui qu'on s'en était promis ci-devant, ou que je voudrais bien y prendre part, et que pour lors l'on obtiendrait encore son but.

Vous ne devez point hésiter d'exposer confidemment tout ceci au lord Holdernesse, quoique seulement par manière de discours et d'acquit, en vous gardant scrupuleusement de faire paraître de la moindre façon, comme si j'en avais pris ombrage ou conçu du soupçon.

Au surplus, vous continuerez par dire audit ministre en termes très polis que, par un juste retour de confiance qu'il m'avait témoignée en me faisant communiquer en dernier lieu par vous les avis qu'il avait reçus touchant le dessein où l'on croyait que la France était de menacer l'Allemagne d'une invasion,289-2 je voudrais bien lui communiquer ce que je venais d'apprendre par un rapport que mon ministre à Ratisbonne m'avait fait,289-3 en conséquence duquel l'on y prétendait qu'on travaillait actuellement à une ligue entre divers princes catholiques du Saint-Empire, et qu'un certain baron de Fechenbach,289-4 ministre de l'évêque de Würzburg, qui se trouvait actuellement à Vienne, pour y prendre l'investiture de l'Empereur au nom de cet évêque, avait été chargé de la part de l'électeur de Bavière et des évêques de Würzburg et de Bamberg de négocier la consistance de cette ligue auprès de la cour de Vienne. Qu'on n'attendait à ce sujet que la fin de la négociation dont le général Pretlack était chargé de la cour de Vienne à Cassel,289-5 pour amener le Landgrave à une réconciliation avec le Prince<290> héréditaire son fils ou pour le disposer au moins à se relâcher des conditions pour le maintien de la religion protestante dans le pays de Hesse auxquelles il avait obligé le Prince, et que, dans le cas que cette négociation échouât, l'on conviendrait d'un concert pour réclamer l'assistance de la France. Vous direz à milord Holdernesse que je ne saurais pas encore répondre de la justesse et de l'exactitude de cet avis, que je ne donnais aussi que tel que je l'avais reçu; mais qu'au cas qu'il se confirmerait, je ne croyais pas que ni Sa Majesté Britannique ni moi aurions lieu d'être embarrassés d'un pareil concert, vu que je croyais trouver encore assez d'expédients à proposer pour le faire échouer, auquel sujet je m'entretiendrais avec le sieur Mitchell, quand il serait arrivé ici,290-1 supposé que ces nouvelles continueraient et que l'affaire deviendrait plus sérieuse. Vous ne manquerez pas de me faire un rapport bien exact de ce que lord Holdernesse vous a répondu sur tout ce qui est dessus.

Federic.

Nach dem Concept.



288-4 Bericht Klinggräffen's, Wien 10. April. Vergl. Nr. 7444.

288-5 Vergl. S. 197.

288-6 Bericht Maltzahn's, Dresden 15. April, nach einem Berichte Petzold's an Brühl, d. d. Wien 24. März. Vergl. Nr. 7447.

289-1 Vergl. S. 87.

289-2 Vergl. S. 274.

289-3 Bericht Plotho's, Regensburg 8. April. Vergl. Nr. 7452.

289-4 Vergl. Bd. XI, 348.

289-5 Vergl. S. 276.

290-1 Vergl. S. 274.