<253> insinuer à Sa Majesté Britannique que, si l'on pouvait mettre l'électorat à couvert par le canal de la cour de Vienne, ce serait une démarche de prudence dans les circonstances présentes, vu le grand nombre d'ennemis que j'avais à combattre et le peu de secours que l'on avait à espérer de ma part après la perte totale de la Russie pour l'Angleterre et la résolution que la première avait prise de secourir les cours de Vienne et de Dresde et d'accéder au traité de Versailles.1 Mais que ces insinuations n'avaient fait aucune impression sur l'esprit du Roi et encore moins sur son ministère anglais, quoiqu'elles eussent été faites avec assez de finesse et que c'eût été par le canal de la comtesse de Yarmouth que les ministres hanovriens avaient fait passer ici leurs craintes au Roi, auprès duquel elles avaient été soutenues par le baron de Münchhausen, toujours fort timide.

Milord Holdernesse, en disant tout ceci dans la dernière confiance et à demi mots au sieur Michell, a cependant eu la bonté de lui avouer de plus qu'on avait cherché à le mettre lui-même mal dans l'esprit du Roi, comme ne lui faisant pas assez sentir la situation périlleuse où il se trouvait en me soutenant et me secondant, et ne cherchant pas à le tirer d'affaires par d'autres moyens. Que ces insinuations avaient été suggérées par les Autrichiens à la régence d'Hanovre, qui les avaient fait soutenir à Londres par le comte Colloredo, au point que ce dernier avait eu l'audace d'en parler à lui, milord, en se plaignant en même temps de ses procédés envers la cour de Vienne et qu'il était l'auteur des propos que l'on avait débités sur son chapitre, et entre autres qu'il avait été le premier à divulguer que l'Impératrice-Reine n'avait pas voulu entrer dans la querelle que l'Angleterre avait avec la France, qu'à condition qu'on l'aidât à m'attaquer. Mais qu'il avait répondu audit comte avec la fermeté et la dignité qu'il convenait à un ministre d'Angleterre, et de façon à le convaincre que de pareils reproches et des ruses de cette façon ne feraient jamais aucune impression sur l'esprit du ministère britannique et n'altéreraient en rien la résolution où il était d'aller en avant avec moi et de faire repentir par là le comte de Kaunitz de ses procédés ingrats envers l'Angleterre, et combien peu celle-ci était disposée de vouloir donner dans les pièges qu'il voulait lui tendre.

Le sieur Michell ajoute, en guise de sa propre réflexion, qu'on voyait par là les motifs pour lesquels le comte Schmettau n'avait pas trouvé dans la régence d'Hanovre tout l'empressement2 et toutes les dispositions qu'il aurait été à souhaiter, afin que l'armée à former en Westphalie pût servir d'abord à couvrir les États de Clèves; qu'on ne devait pas être surpris non plus, si l'on trouvait dans cette régence de la timidité et de l'irrésolution, puisque c'était en conséquence de ces représentations que le Roi ne s'était pas décidé encore de faire marcher



1 Vergl. S. 164. 241.

2 Vergl. S. 175. 177. 183.