<127> désertion a été épouvantable. J'ai recomplété les régiments, comme je l'ai pu, et, malgré cela, j'ai près de 36,000 prisonniers et passé 1000 officiers à nourrir, ce qui m'incommode fort. Nous assiégeons à présent Liegnitz, où il y a 3400 hommes. Si aujourd'hui ils ne sortent pat capitulation, nous les aurons en trois jours. Reste à Schweidnitz, que je tiendrai bloqué, en faisant retirer les paysans, les bestiaux et les grains de tous les villages les plus proches, et plaçant des corps à la distance d'un mille et demi à la ronde avec beaucoup de cavalerie, pour leur interdire entièrement l'entrée de tous les vivres; ce qui les fera tomber d'eux-mêmes en 6 ou 7 semaines.

J'ai oublié de vous dire, mon cher frère, qu'il faudra user d'exécution dans le pays d'Anhalt,1 pour faire livrer les choses qu'il nous faut, surtout les recrues dont nous avons grand besoin, et dont votre régiment aura sa part.

Je suis fort inquiet pour le pauvre Ferdinand qui a pris une grosse fièvre. Il est resté à Breslau. Je souhaiterais fort que Cothenius y fût. Tâchez, je vous en supplie, de l'envoyer, je n'ai pas grande confiance en ces médecins de Breslau.

J'ai appris ici bien des détails, par ces officiers prisonniers, de l'armée autrichienne, qui ne lui fait guère d'honneur; tous disent le Diable du prince Charles; un quartier-maître des logis est celui en qui gît leur sagesse, y joint un colonel de l'artillerie, nommé Walter, et un aide de camp de Nadasdy. Ce tableau se présentait bien à la vue de loin, mais il perd à être examiné de près. Voilà comme sont toutes les choses humaines, et pourquoi les anciens rois de Perse ne se montraient jamais, pour qu'on eût d'eux une plus haute idée.

Enfin, mon cher frère, nous espérons d'entrer dans nos quartiers vers les premiers jours de janvier. Cela j'appelle une campagne qui en vaut trois. Je n'en puis plus, mon tempérament commence à s'user, et je suis malade et souffre beaucoup de coliques toutes les nuits. Je n'entrerais pas dans ces détails, si je ne croyais que votre amitié y prend quelque part; mais cela n'y fait rien, dès que nos affaires prennent un bon train. Je bénirai le Ciel, si je suis le seul qui souffre!

Comme je suis ici dans le voisinage de vos terres, je ferai ce qui dépendra de moi, pour que vous n'en souffriez pas, et que vos intérêts pâtissent le moins possible des calamités générales. Adieu, mon cher frère, je suis avec la plus tendre estime, mon cher frère, votre fidèle frère et serviteur

Federic.

Nach der Ausfertigung. Eigenhändig.



1 Vergl. S. 52. 96.