9786. A LA PRINCESSE DOUAIRIÈRE D'ANHALT-ZERBST A ZERBST.

Breslau, 19 février 1758.

Madame ma Cousine. J'ai été également sensible et surpris en lisant d'un bout à l'autre la lettre qu'il vous a plu de m'écrire en date du 14 de ce mois, ne pouvant point concevoir comment le sort de Votre Altesse ni celui du prince Son fils et de ses sujets puissent être le moins du monde en relation avec la fâcheuse affaire du marquis de Fraigne.254-3 Vous connaissez, Madame, les sentiments d'estime et d'amitié que je vous porte,254-4 et à quel point j'ai toujours été soigneux de les entretenir, et quant au prince votre fils et ses sujets, je puis hardiment provoquer au jugement de Votre Altesse, si j'aurai pu donner une marque plus éclatante de mon amitié pour Sa personne et de ménagement pour Son pays qu'en dispensant entièrement ce dernier, préférable ment aux autres États de 1'Anhalt, des inconvénients ordinaires et inséparables de la guerre.254-5

Cette circonstance une fois avérée, il ne saurait être question simplement que du séjour dudit marquis à Zerbst. Je me dispense d'entrer<255> en discussion sur ce qu'il a plu à Votre Altesse de me marquer làdessus; mais je puis bien L'assurer que j'ai tout lieu de croire, non pas par des soupçons conçus à la légère, mais par des preuves constatées, que le principal objet que ledit marquis a eu en vue pour l'engager à se rendre à Zerbst, n'en a été point d'autre que celui d'y nuire à mes intérêts. J'ose donc espérer que Votre Altesse voudra bien considérer si j'ai pu tranquillement laisser faire le sieur de Fraigne à Zerbst, pendant un temps de guerre aussi critique que la présente, et je me flatte que Votre Altesse voudra bien contribuer Elle-même de tout Son pouvoir à ce que cet homme, que je ne saurais absolument point endurer à Zerbst où il se trouve en passe de faire du tort à mes intérêts, s'en retire, pour me trouver par là à même de continuer l'amitié invariable que je vous ai vouée; sans quoi, je me verrais indispensablement obligé de mettre en usage les moyens convenables pour m'assurer de la personne dudit sieur de Fraigne, en le faisant conduire à quelque forteresse, pour l'empêcher par là de me nuire par ses rapports sinistres à la cour de France.

Mais je me tiens assuré que Votre Altesse ne voudra jamais consentir que les choses en viennent à pareille extrémité, étant porté d'ailleurs à témoigner en toute occasion à Votre Altesse les sentiments d'estime, de considération et d'amitié avec lesquels je suis, Madame ma Cousine, de Votre Altesse le bon cousin

Federic.

Nach dem Concept.



254-3 Vergl. S. 248.

254-4 Vergl. Bd. III, 237; IV, 55; XIV, 15. 16. 100.

254-5 Vergl. S. 52.