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11140. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE KNYPHAUSEN A LONDRES.

Reich-Hennersdorf, 29 juin 1759.

Vous verrez par la copie ci-close chiffrée ce que mes ministres du département des affaires [étrangères] se sont vu obligés de me représenter au sujet du landgrave régnant de Hesse-Cassel, qui, après que les troupes françaises ont de nouveau inondé toute la Hesse, a été contraint de se sauver encore à Brême et en est au désespoir, de façon que nous avons à craindre sa défection entière, à moins que nous [ne] le satisfassions sur l'article qu'il demande.

Mon intention est donc qu'après que vous vous aurez fait un extrait ou précis de la susdite relation de mes ministres, pour vous imprimer d'autant mieux tout ce qu'elle comprend au sujet du Landgrave, vous en parliez au sieur Pitt, et, s'il est besoin, à d'autres ministres anglais encore, pour leur représenter le cas tout naturellement, en ajoutant que, quoique je me rappelais parfaitement tout ce qui s'était passé déjà à cet égard, et que je reconnaissais même la solidité des raisons que le ministère britannique avait eues autrefois pour ne pas se prêter à ce qu'alors la demande du Landgrave ne fût comprise dans sa nouvelle convention avec l'Angleterre,1 que néanmoins je croyais que, dans les circonstances présentes bien critiques encore des affaires en Allemagne, la chose méritait de l'attention, puisque ce serait vraiment un dérangement total et très fâcheux pour nos affaires en Allemagne, si le Landgrave, accablé de vieillesse et de chagrin et sollicité par ceux auprès de lui qui pour leur propre intérêt désirent qu'il se tire d'embarras à quelque prix que ce soit, fît un coup de désespoir pour rappeler ses troupes de l'armée alliée. Que je croyais donc que pour apaiser et tranquilliser ce prince, l'on pourrait bien se prêter à le satisfaire à cet égard, de la façon que mes ministres l'ont proposé, au moyen d'une déclaration ou plutôt par un morceau de papier qui, le cas existant, ne serait d'aucune conséquence, afin de contenir par là ce prince dans la bonne voie et l'empêcher qu'il ne se jette pas tout éperdument dans les bras de nos ennemis.

Vous donnerez à cette proposition de ma part la tournure que vous estimerez la plus convenable à l'égard du sieur Pitt, mais vous expliquerez d'ailleurs tout naturellement. Et comme l'affaire pourrait presser, vous m'en ferez au plus tôt mieux votre réponse, afin que je puisse en rendre compte au Landgrave.

J'attends à tout moment des lettres de Dohna. Selon toutes les apparences, l'armée russe sera perdue, car ils sont en trois corps. Dohna marche sur celui du milieu. Tous ces gens seront chassés au delà de



1 Vergl. S. 3. 4. 29. 31. 42. 51