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11486. AU PRTNCE HENRI DE PRUSSE.

[Suckow, près de Neustädtel, 24 septembre 1759.j1

J'ai été si fatigué ces jours passés que je ne vous ai rendu que la moitié de mes idées, et je crois devoir y ajouter quelque chose, pour ne vous laisser aucun scrupule.

Je commence par vous. Il est certain que vous avez très bien conduit l'armée, et que vous avez entièrement rempli l'objet qu'on s'était proposé; mais ce n'était pas votre faute que les Russes sont marchés à Francfort, que Laudon les a joints, que j'ai été battu, que notre correspondance a été interceptée, et personne, à moins d'être injuste, peut vous rendre responsable de ces malheurs; mais à présent que tout le tableau de la guerre est changé, il faut changer par conséquent. Pour moi, j'ai gagné Neustädtel, et je peux couvrir Glogau et la Basse-Silésie de ce côté-ci. Pour vous, après avoir renforcé Fouqué, si vous prenez quelque poste à portée de Finck, qui a posté Wunsch de ce côté-ci de l'Elbe, comme vous le verrez par ma lettre, vous pouvez vous fortifier de quel côté de la rivière que vous le jugez à propos. Vous pouvez intercepter la communication de Daun et des Russes; si Daun s'affaiblit trop par des détachements, vous pouvez lui rendre la vie dure et l'obliger par là à les rappeler; si Daun veut marcher en Silésie, vous avez le chemin par Muskau pour y venir; s'il quitte Dresde, qui empêchera qu'on ne le reprenne? s'il y reste, il faut finir ici avec les Russes, et voilà ce que je pense.

S'ils veulent à tout prix prendre Glogau, je les attends ici sur leur passage, et d'une façon ou de l'autre il faut qu'ils en viennent à une bataille. Soltykoff2 a des ordres de ne plus rien risquer; s'ils renoncent au siège de Glogau, et que les rosées blanches viennent, leurs chevaux ne peuvent plus pâturer, et ils sont obligés de quitter la campagne; ainsi ma besogne ira ici jusqu'au 10 ou 14 d'octobre. C'est alors qu'il faut penser à Laudon, lequel, sur son retour par la Saxe, ne saurait nous échapper, surtout si nous sommes attentifs de le mettre entre nous deux. Je crois donc que je reviendrai en Saxe sur la fin de la campagne, et que la prise de Dresde en fera la clôture.

Prenez, mon cher frère, ces raisonnements sur l'avenir pour ce qu'ils valent, car il y a bien des si; mais comme je doute que notre correspondance subsiste après deux ou trois marches que vous ferez, je vous rends compte de toutes mes idées, pour qu'en cas que les évènements répondent à ce que je présume, vous puissiez savoir à peu près ce que je ferai, pour que nous agissions de concert.

L'apostille que je vous ai envoyée hier,3 contient des choses très



1 Das Datum von Cöper zugesetzt. Das Schreiben vom 24. September an den Prinzen Ferdinand von Preussen, das sich in den Œuvres Bd. 26, S. 545 findet, ist von dem Herausgeber falsch datirt. Es gehört in den August 1759; vergl. Nr. 11368.

2 In der Vorlage: Schuwalow. Im Déchiffré der Ausfertigung: Soltykoff.

3 Der Zusatz S. 558.