11719. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE FINCKENSTEIN A BERLIN.

Freiberg, 29 décembre 1759.

Secret et pour vous seul. Dans la situation où je me trouve encore, j'ai cru nécessaire de vous informer de l'état où je me trouve actuellement, afin que vous sachiez en juger et vous diriger en conséquence dans le soin des affaires publiques.

J'ai reçu le secours que le prince Ferdinand m'a détaché des troupes de l'armée alliée. A peine ce secours nous est-il arrivé à Chemnitz,<727> que ledit Prince me marque727-1 que Broglie commence à faire des démonstrations, comme s'il voulait tirer parti de l'affaiblissement du Prince, pour recommencer les opérations, malgré la rude saison; qu'il venait de détacher 16 bataillons avec de la cavalerie sur la Basse-Lahn, et que, selon quelques avis, c'était pour les faire joindre à un corps de troupes qui revenait du Bas-Rhin, et qui, après avoir passé le Rhin audessous de Coblenz, pour s'avancer727-2 sur Hachenburg;727-3 pendant que ce corps727-4 menaçait sa droite, les Württembergeois,727-5 renforcés par les Français, reparaissaient sur sa gauche, et que Broglie se tenait, en attendant, avec le gros de l'armée à Friedberg. Quoique le Prince prenne ses mesures, aussi bien qu'il peut, pour faire échouer ces projets, malgré son infériorité, vous jugerez bien que, dans sa situation, il voudra ravoir peut-être le secours qu'il m'a envoyé. Quoique, jusques à présent, il n'en dise rien expressément, il ne faut pas douter que ce ne soit en suite d'un concert pris entre les cours de France et de Vienne, pour contribuer à mettre en exécution le projet des quartiers d'hiver727-6 pour la première.

Daun reste en attendant immobile auprès de Dresde et tient occupé le poste de Dippoldiswalde; l'hiver s'avance, incommodité que les deux armées ont en commun; mais Daun a l'avantage de la supériorité en troupes et celui des postes de Dresde et de Dippoldiswalde qu'il a fortifiés, où ses forces sont ensemble pour se soutenir. Je marcherai demain vers Dippoldiswalde et verrai si et où je pourrai attaquer ce poste, pour en déloger l'ennemi, le resserrer en conséquence et l'obliger par là à évacuer la Saxe. S'il est attaquable, je le ferai; si je vois que cela soit absolument impraticable, sans mettre tout au hasard, ou si Daun y envoie encore un nombreux corps, je serai obligé de m'en retourner ici; mais alors faudra-t-il que je renvoie le secours au prince Ferdinand, et par là je me trouverai dans le même état d'infériorité en forces qu'auparavant et dans le même embarras, et ne vois pas la fin de notre campagne.

Vous voyez par là que nous n'avons point décidé ici, et que ma situation n'est pas encore riante, à moins de quelque heureux incident, qu'on ne saurait prévoir.

Gardez-moi le secret le plus absolu sur tout ce que dessus, que je ne confie qu'à vous seul.

Federic.

Nach der Ausfertigung.

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727-1 Schreiben des Prinzen Ferdinand, d.d.Kroffdorf 21. December. Vergl. Nr. 11720.

727-2 So im Déchiffré der Ausfertigung und im Concept. Im Schreiben des Prinzen: „qui, après etc., s'avance sur Hachenburg“ .

727-3 Stadt, nordnordöstl. von Coblenz.

727-4 So im Concept. Im Déchiffré der Ausfertigung: „sa cour“ .

727-5 Vergl. S.681.

727-6 Vergl. S. 678. 679.