<204> France ne dépendra que de la façon dont les Anglais sauront convenir avec la France, pour terminer leurs querelles de mer.

Vous chercherez de parler le sieur Pitt, pour lui dire de ma part avec un compliment convenable que, comme par sa sage et ferme conduite la France se voyait réduite à demander la paix de l'Angleterre, qui ne dépendra que d'elle et des conditions qu'elle voudra y mettre, que je croyais que, pour en convenir des préliminaires, il n'aurait que de donner au plus tôt des instructions au général Yorke pour s'en concerter avec le comte de Saint-Germain,1 et qu'il me paraissait que, pour peu que cette négociation fût poussée, on en conviendrait en peu de temps. Que, quant à mon sort, je le remettais aux mains de l'Angleterre, et que j'étais réjoui de le voir dans de si bonnes mains, surtout que celles du digne sieur Pitt; que je [me] flattais, cependant, qu'en convenant avec la France sur les préliminaires de paix avec l'Angleterre, on en conviendrait aussi avec la première à mon sujet, pour que j'eusse mes sûretés vis-à-vis de la France, ne dût cela se faire en tout cas [que] par des articles secrets des préliminaires.

A ce que vous verrez par la lettre du bailli de Froullay et les éclaircissements joints, il répugne un peu à la France de négocier et de conclure directement la paix avec moi, comme principal ennemi de l'Impératrice son alliée, à l'égard de laquelle elle voudrait du moins garder quelque dehors pour l'apparence, mais bien par l'Angleterre. Pour donc n'obvier pas au grand ouvrage salutaire, je veux bien passer sur cette formalité et remettre mes intérêts à l'Angleterre, étant persuadé que je [ne] saurais les mettre dans de meilleures mains, et qu'elle voudra bien prendre les précautions requises à ce que la France ne saurait pas nous duper à mon égard et qu'elle fût obligée encore d'écarter les Suédois, afin que ceux-ci ne sauraient plus agir contre moi.

Comme mon émissaire, le sieur d'Edelsheim, que la cour de Gotha m'a prêté, a été lui-même le porteur de la réponse du bailli de Froullay à moi,2 et qui m'a donné les éclaircissements par écrit, tels qu'on les lui a dits, et qu'il s'offre d'aller encore d'ici à Londres pour expliquer de bouche plus amplement à vous et aux ministres anglais tout ce qu'il a appris à son séjour de Paris, tant au susdit sujet que de la situation actuelle de la France, je le ferai partir demain d'ici pour Londres, en le munissant d'une lettre d'adresse à vous.3 Vous aurez soin, après vous être expliqué avec lui, de l'introduire auprès du sieur de Pitt et des autres ministres anglais où vous le trouverez convenable, afin qu'il s'y explique également. Je crois que cela fera un bon effet. Ils pourront même se servir de son canal, s'ils le trouvent à propos, pour de nouvelles insinuations.

Vous n'oublierez pas de faire remarquer adroitement aux ministres



1 Vergl. Nr. 11944.

2 Vergl. dagegen den Anfang des Schreibens.

3 Cabinetsschreiben d. d. Freiberg 29. März.