12149. AU FELD-MARÉCHAL PRINCE FERDINAND DE BRUNSWICK.

Au camp de Meissen, 9 juin 1760.

J'ai été vivement touché de reconnaissance au sujet de la communication que vous avez bien voulu me faire par votre lettre du 5 de ce mois, touchant les arrangements403-1 que, de concert avec M. le Duc régnant votre frère, vous pensez de prendre pour couvrir ses États du côté de Nordhausen et pour mettre obstacle, autant qu'il se peut, en même temps à ce que les troupes ennemies ne sauraient ravager, comme l'année passée, mes États de Mansfeld et de Halberstadt.403-2 Le projet m'en paraît beau et très bien pensé, mais il me vient justement dans la circonstance où je suis de faire mes arrangements pour passer à l'autre rive de l'Elbe, sans abandonner cependant Meissen ni mon camp retranché ici, où je laisserai le lieutenant-général Hülsen avec quelque corps. Pour ce qui regarde la garnison présente de Magdeburg, je serais bien en peine d'en retirer quelques troupes. Il n'y a là que 2 bataillons assez faibles avec un bataillon de milices, qui ont, outre le service ordinaire, à garder les 900 officiers prisonniers de guerre des Autrichiens et des Cercles, et un millier de soldats [communs] prisonniers. Auprès de Leipzig je n'ai que le général-major Salenmon avec un bataillon franc et 2 escadrons de hussards. Voilà tout ce que j'ai pu laisser dans ces contrées.

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De ces petites choses Votre Altesse saura juger combien ma situation est plus mauvaise que peut-être vous ne vous l'êtes représentée. Je me vois forcé d'engager quelque affaire décisive à tout prix, pour arriver assez à temps dans la Silésie, où Laudon est entré avec une armée que vous pouvez sûrement croire forte de 50000 hommes, et où il menace de mettre le siège devant Neisse et, en après, devant Breslau ou Brieg ou peut-être Schweidnitz, tandis que mon frère est obligé de marcher contre l'armée russienne qui veut agir en deux corps, l'un pour attaquer Glogau, l'autre pour faire le siège de Colberg.

Voilà en peu ma situation présente, et vous pouvez croire que souvent je ne sais où donner de la tête. Il me manque partout assez de troupes pour m'opposer suffisamment partout aux forces des ennemis, partout en forces considérablement supérieures et qui, d'ailleurs, commencent cette année-ci leurs efforts contre moi en même temps. Dans quinze jours d'ici vous aurez plus de nouvelles de ma destinée.

Je ne saurais finir ma lettre, sans vous remercier d'avoir eu l'attention de tenir jusqu'à présent l'armée des Cercles en échec pour n'oser remuer du pays de Bamberg, sans quoi ma situation aurait été tout-àfait accablante.

Friderich.

Nach der Ausfertigung im Kriegsarchiv des Königl. Grossen Generalstabs zu Berlin.



403-1 Prinz Ferdinand beabsichtigte, ein Corps von 2000 Mann theils aus seiner Armee, theils aus Milizen von Hannover und Braunschweig zu bilden, welches geniigen würde, um Mansfeld und Halberstadt zu decken, „pour peu qu'il plaise à Votre Majesté de faire marcher pour ce même but quelque détachement, que Votre Majesté pourrait peut-être tirer de la garnison de Magdeburg“ .

403-2 Vergl. S. 385.