<350>nous préparions à attaquer les Autrichiens. Us étaient postés sur une montagne qui faisait comme un demi-cercle dont la gauche tournait vers notre droite; et leur droite était entièrement éloignée de nous; dans la vallée, au pied de la montagne, il y avait un marais au travers duquel il coulait un ruisseau marécageux; à l'extrémité de leur gauche, l'on voyait quelques grands étangs qui couvraient tout leur flanc, en retournant vers les derrières. Nous commencions à nous former de notre côté sur la montagne qui était vis-à-vis de leur centre, mais le terrain qu'il y avait à notre droite, se trouva si étroit qu'à peine aurait-on pu mettre six bataillons en bataille, et, cela fait, on ne pouvait les faire marcher en avant, à cause du précipice qui séparait les deux armées. Le centre était encore plus immuable, car un monticule et deux fonds considérables le séparaient de l'armée ennemie. Toutes ces positions bien reconnues, il fut facile de juger que c'aurait été une témérité très condamnable que d'engager une affaire dans ces circonstances. C'est ce qui m'obligea à me replier vers mon camp; je cachai cette manœuvre à l'ennemi par quelques fausses démonstrations, comme si l'on avait toujours intention de les attaquer, ce qui me réussit si bien que toute l'armée rentra dans le camp, sans qu'il parût une âme de l'ennemi.

Les fourrages étaient cependant consumés, aux environs de Konopischt, où nous avions séjourné longtemps; il fallait changer de camp; nous ne pouvions prendre d'autre position que celle de Pischeli,1 le côté de Rattay étant trop montûeux et moins abondant en fourrage que les autres contrées de Bohême. Deux jours après, le prince Charles vint occuper le camp que nous avions quitté. Le fourrage se livrait à son armée par ses derrières, ce qui lui donnait autant de facilité que nous trouvions d'obstacles. De Prague à Pischeli, il y a cinq lieues d'Allemagne; les chemins étaient remplis de défilés, l'ennemi nous enlevait quelquefois des caissons, et, pour surcroît d'inconvénients, les gens préposés aux vivres s'étaient si mal acquittés de leur fonction qu'après avoir séjourné huit jours à Pischeli, nous n'étions pas en avance de pain d'un jour pour l'armée.

Les ennemis avaient fait un détachement, commandé par le général Ghillanyi, qui marcha le même jour à Kammerburg que nous marchions à Pischeli. Je fis, d'abord que j'en fus informé, un gros détachement contre celui-là, sous les ordres du général Nassau, avec ordre de côtoyer le corps autrichien et de le chasser de Kammerburg. Le général s'acquitta très intelligemment des ordres que je lui avais donnés, il chassa M. Ghillanyi de Kammerburg2 et le prévint sur le poste de Kolin3 dont l'Autrichien voulait s'emparer. M. de Nassau n'eut pas fait deux marches qu'il me fut impossible de communiquer avec lui, et bien moins de recevoir des nouvelles de ce qu'il était devenu. Dans cette situa-



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