<224> Bien loin de donner des marques de ressentiment, mêlées d'aigreur et d'animosité, le Roi fit faire, immédiatement après la mort du dernier Empereur, des propositions amiables au roi de Pologne, dans l'intention de trouver un terme de réconciliation; on voyait dans ces propositions un désintéressement parfait de la Prusse, et des avantages considérables et des agrandissements pour la maison de Saxe.

Ces démarches pacifiques furent infructueuses. La cour de Dresde, enorgueillie par la frivole idée que ces troupes avaient eu une part considérable à la marche rétrogradive que firent les Prussiens, à la fin de l'année passée, pour se poster sur les frontières de la Silésie: l'espérance chimérique qu'elle conçut de grandes conquêtes, fondant ses vœux ambitieux sur les iniquités du traité de Varsovie : la jalousie d'un voisin dont cette cour avait vu l'agrandissement avec une envie chagrine: en un mot, une fermentation de passions, et peut-être des intérêts particuliers des ministres, lui firent fermer l'oreille aux véritables intérêts de la Saxe, et, en même temps, à la voix de la justice et de l'équité.

Ce traité de Varsovie1 engageait le roi de Pologne à fournir un corps de 30,000 auxiliaires à la reine de Hongrie, dans l'intention de faire la conquête de la Silésie. On sait qu'il y est stipulé, de plus, qu'en reconnaissance de ce secours, la reine de Hongrie céderait au roi de Pologne ses droits sur les principautés de Glogau, Jauer, Wohlau, et sur les villes commerçantes des montagnes; que le roi d'Angleterre promet de payer une somme assez considérable à la Saxe, pour que le Roi soit mis en état d'entretenir un corps de troupes en Pologne et de rendre ce royaume héréditaire dans sa maison.

En conséquence de ce traité, les Saxons entrèrent le 26 de mai en Silésie, avec les Autrichiens, et s'avancèrent jusqu'à Friedberg, lorsqu'on fit partir de Dresde, presqu'en même temps, un train d'artillerie, et des pontons, pour prendre la route de Glogau, que les Saxons avaient intention d'assiéger. Mais la Providence, qui gouverne les empires par sa puissance et qui veille sur les choses humaines par sa sagesse, elle qui se plaît à confondre le conseil des superbes et de ceux qui se fient en leur propre force, en avait décidé autrement. L'on sait quelle gloire immortelle les troupes prussiennes s'acquirent le 4 de juin, et que les suites de cette victoire achevèrent de détruire les desseins que les ennemis avaient formés contre la gloire et la puissance du Roi. Le monde entier est informé des cruautés inouïes que ces ennemis ont exercées en Silésie;2 leur mémoire y est en horreur et en abomination, et il faut avouer qu'il est honteux à des peuples chrétiens et policés de faire une guerre dont les barbares mêmes auraient lieu de rougir.

Pendant que tant d'horreurs se commettaient en Silésie, et que le Ciel, juste vengeur des crimes, se plaisait à les punir d'une façon si



1 8. Januar 1745. Vergl. S. 83.

2 Vergl. S. 191.