1731. AU CONSEILLER ANDRIÉ A LONDRES.

Berlin, 19 février 1745.

Comme les affaires générales de l'Europe et principalement celles de l'Empire se trouvent, depuis la mort de l'Empereur, dans la plus violente crise où elles n'ont jamais été encore jusqu'ici, et l'élection d'un nouvel empereur aussi bien que l'ouverture de la campagne approchant à grands pas, il est fort naturel qu'un chacun veut et doit savoir à quoi s'en tenir, quel système on doit choisir et quelles mesures on aura à prendre tant pour sa propre sûreté que pour ses convenances. Il est impossible de pouvoir rester plus longtemps dans l'incertitude où je me trouve maintenant par rapport aux véritables dispositions du ministère présent de la Grande-Bretagne et que tout ce que le lord Harrington<56> vous a répondu jusqu'ici aux différentes insinuations que vous lui avez faites par mes ordres, ne consiste que dans ses idées particulières et qu'il pourra toujours révoquer, et non dans des réponses et des résolutions ministériales, qui seules doivent tendre à une prompte conclusion et consistance de la négociation secrète que je vous ai confiée, vous insisterez auprès de ce ministre, avec toute la politesse imaginable, de finir, le plus promptement qu'il est possible, ce que vous avez commencé avec lui. Si c'est tout de bon du ministère anglais de m'avoir et de me détacher de la France, il faut qu'on se dépêche et qu'on conclue avec moi sans perte de temps, sans quoi, et si on laisse traîner la chose en longueur, on ne manquera pas de rencontrer des obstacles insurmontables, et le tout échouerait à coup sûr; ce que vous ferez entendre poliment au lord Harrington, en y ajoutant que je suis sollicité de tout côté, non seulement par rapport à ma voix pour l'élection prochaine, mais d'agir aussi avec la dernière vigueur en faveur de mes alliés, ce que, Dieu merci, je suis en état de faire avec une armée de plus de 100,000 hommes, et que je pourrais faire avec succès, ayant chassé les Autrichiens de la Haute-Silésie et de la comté de Glatz, et étant maintenant le maître de déboucher en Bohême et en Moravie; qu'il ne me restait point d'autre parti à prendre que celui-là, si je ne voyais point de jour de parvenir à une prompte pacification entre moi et la reine de Hongrie, en y comprenant les maisons de Bavière, palatine et de Hesse-Cassel, sur le pied que je vous ai prescrit.

C'est pourquoi, et pour vous mettre plus promptement en état de procéder sans délai à la négociation formelle et même à sa conclusion, je vous adresse le plein-pouvoir ci-joint pour vous autoriser suffisamment de mettre la main à l'œuvre, selon les instructions que je vous ai suffisamment fournies sur cette grande affaire. Vous pouvez, aussi, informer, si vous le trouvez à propos et convenable à mes intérêts, le lord Harrington que vous êtes muni des pleins-pouvoirs suffisants pour cet effet, que je vous permets même de lui montrer et de lui laisser lire, sans toutefois lui remettre l'original ni même une copie, avant que la négociation ne soit actuellement entamée et le plein-pouvoir du roi d'Angleterre prêt à être échangé contre le vôtre. Le plus court chemin pour finir promptement serait, selon moi, de faire une convention entre moi et le roi d'Angleterre dans laquelle tous les points préliminaires de la paix entre moi et la reine de Hongrie fussent réglés de la manière qu'on en pourrait convenir sur les idées que je vous en ai communiquées, et que vous puissiez, conjointement avec les ministres du roi d'Angleterre, dresser, dans le plus grand secret, un projet là-dessus, pour l'envoyer bien chiffré, par courrier exprès, à mon approbation; bien entendu que les cours de Bavière et palatine et la maison de Hesse-Cassel y soient comprises, et que l'Angleterre me garantisse, de la manière la plus forte et la plus solennelle, toutes les conditions dont on conviendra, en se faisant fort d'obliger la cour de Vienne, d'une manière ou d'autre,<57> d'y souscrire. J'attends avec la plus grande impatience là-dessus votre rapport détaillé, afin que je sache finalement ce que je dois espérer ou non du nouveau ministère d'Angleterre; puisque, si on ne finit pas promptement, je ne serais plus en état de faire ce que je pourrais faire à présent, et que, si on veut y procéder par la voie de la communication ordinaire avec la cour de Vienne et les autres alliés de l'Angleterre, on, peut compter que toute l'affaire échouera infailliblement, et que le secret nécessaire que je demande sur toute chose au monde pour préalable, ne saurait jamais être gardé. Je me réfère pour tout le reste à mes instructions précédentes, en me reposant entièrement sur votre fidélité et zèle pour mon service, que je récompenserai d'une manière que vous aurez entièrement lieu d'être satisfait.

Federic.

H. Comte de Podewils.

Nous sommes sur le point de rentrer en Bohême; il faut faire sentir au ministère que, plus nous aurons de succès, et plus nous hausserons nos prétentions, ainsi que, s'il nous veut avoir à bon marché, toujours avec l'incluse de la Bavière, Palatin et Hesse, il en est temps. Hâtezvous de me donner bientôt une réponse catégorique, afin qu'en tout cas je puisse prendre des mesures fermes, sans me laisser amuser.

Nach der Ausfertigung. Der Zusatz eigenhändig.