1732. AU MINISTRE D'ÉTAT BARON DE MARDEFELD A SAINT-PÉTERSBOURG.

Berlin, 20 février 1745.

Vous concevez sans peine que je n'ai pas lieu d'être infiniment édifié de la note du ministère russien57-1 que vous m'avez envoyée, à la suite de votre dépêche du 6 de ce mois, concernant la médiation de l'Impératrice.

Le comte de Tschernyschew a pareillement communiqué la pièce à mes ministres. Ce que j'y trouve de plus étrange, c'est qu'on met en fait et pour base que j'ai fait faire la demande formelle et solennelle à l'Impératrice pour qu'elle se chargeât de la médiation, tandis que je ne vous ai jamais ordonné d'en faire une proposition formelle de ma part, mais seulement de sonder les dispositions de Sa Majesté Impériale sur cet article. Aussi ne douté-je pas que ce ne soit un artifice du comte de Bestushew, inspiré peut-être par son gouverneur saxon, et qu'il a couché tout exprès la pièce de cette façon, pour me rendre suspect à mes alliés, ou du moins pour ménager un prétexte à sa cour de nous obtruder la médiation, à moi et mes alliés, d'une<58> manière désagréable, et de nous forcer à recevoir des conditions peu avantageuses.

Quoi qu'il en soit, comme les conjonctures présentes exigent de traiter la cour de Russie avec beaucoup de ménagement, j'ai fait répondre préalablement, de bouche et en termes généraux, au comte de Tschernyschew:

Que j'étais très sensible aux offres amiables de sa souveraine, persuadé que mes intérêts ne pouvaient être jamais tombés en meilleure main; mais que j'espérais, aussi, qu'avant de passer outre, Sa Majesté Impériale voudrait bien s'ouvrir confidemment à moi sur divers points qu'il fallait de toute necessité régler par préalable, tant pour ce qui regarde la nature et l'objet de la médiation, si elle doit s'étendre à la pacification générale ou se borner au rétablissement de la tranquillité en Allemagne, que par rapport au plan préliminaire qu'on proposerait aux parties intéressées, aussi bien que sur les dispositions où les ministres russiens, chargés de sonder les cours belligérantes, les ont trouvées relativement à cette matière.

C'est de cette façon-là que vous ferez bien de vous expliquer, pareillement, sur ce chapitre, observant toutefois de ne le faire qu'en guise d'insinuation, en vous rapportant à ce qu'on a fait entendre ici au comte de Tschernyschew, et d'éviter avec soin que le ministère russien n'en prenne occasion de vous faire donner une résolution par écrit où votre proposition soit étalée tout au long, ainsi qu'il l'a affecté dans la note susalléguée, très vraisemblablement dans le dessein d'en faire un usage pernicieux à mes intérêts, soit auprès de mes alliés, soit ailleurs.

Federic.

H. Comte de Podewils.

Nach dem Concept.



57-1 Vergl. Preussische Staatsschriften I, 706. 712.