2031. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS A BERLIN.

Camp de Schatzlar, 18 octobre 1745.

Mon cher Podewils. Voici la troisième lettre, en comptant le chiffre,314-1 que je vous écris. Rien ne dorme une plus vaste carrière au pyrrhonisme que la situation politique dans laquelle je me trouve; et j'avoue que la grande espérance que je fonde, est sur l'orgueil et la fierté du roi de la Grande-Bretagne, qui ne voudra jamais avoir fait un traité qui le couvrirait de honte et le discréditerait à jamais en Europe. Le point décisif consiste à savoir jusqu'à quel point la cour de Londres étend son autorité sur celle de Vienne. Je regarde la négociation du petit Saul avec Blondel comme de ces petites infamies saxonnes desquelles nous avons tant d'exemples, mais qui ne mènent à rien. La reine de Hongrie n'est pas à même de faire sa paix avec la France, à moins de grands sacrifices, et si elle en était capable, la bourse des Anglais et Hollandais nous serait ouverte, et peut-être même leurs troupes.

J'approuve votre idée touchant notre corps auxiliaire;314-2 je ne puis, si on le souhaite, envoyer que six bataillons, ainsi il ne faut pas promettre plus que l'on ne peut tenir; mais je vous autorise à ceci.

Nos deux relations de Danckelman sont bien différentes. Dans l'une Asseburg et Diemar semblent convaincus que notre paix est fort avancée; dans l'autre, il y paraît un éloignement prodigieux. Si la Reine suit l'avis de ses généraux et même du prince Charles, vous pouvez compter qu'elle finira avec moi plutôt aujourd'hui que demain. Ma fermeté a fait fléchir le prince Charles, il a écrit une lettre fort obligeante au prince Léopold, il renverra aujourd'hui Eichel. Hier ils ont tous été échangés.

L'ennemi fait faire des abattis tout le long de ma frontière, et ils la respectent si fort que depuis six jours ils paraissent avoir attention de ne pas violer le territoire. B faut voir à quoi tout cela aboutira; du moins pouvez-vous être persuadé que la campagne est finie, et si bien finie que je ne vois point d'apparence qu'il puisse se passer encore la moindre chose.

<315>

Vous ferez à Woronzow le meilleur accueil que vous pourrez. S'il vient ici, j'en ferai plus qu'il ne faut; mais si on peut le détourner de son voyage de Naples, ce sera le coup de parti.315-1

Si la cour de Vienne est devenue plus souple aux volontés du roi d'Angleterre, cela ne peut parvenir au prince Charles que tout au plus entre le 22 et le 28 de ce mois; si cela n'arrive point alors, c'est un signe qu'on écrira encore une fois en Angleterre, et que, si cette tentative ne réussit point, on se rendra. Vous savez que cette cour ne fait jamais les choses de bonne grâce. J'ai corrigé quelques endroits mal imprimés dans ma relation,315-2 que je vous prie de faire corriger. Il nous faudrait un bon correcteur dans l'imprimerie, ce serait très nécessaire.

Je suis avec bien de l'estime votre fidèle ami

Federic.

Nach der Ausfertigung. Eigenhändig.



314-1 Nr. 2029.

314-2 Vergl. S. 312.

315-1 Woronzow war laut Podewils' Bericht vom 15. October für den Schluss der Woche vom 17. bis 23. October in Berlin angemeldet, von wo er über Dresden nach Süditalien zu gehen beabsichtigte. Vergl. S. 287.

315-2 S. 293.