2304. AU CONSEILLER ANDRIÉ A LONDRES.

Potsdam, 15 août 1746.

J'ai reçu les relations que vous m'avez faites en date du 2 et du 5 de ce mois. Je suis fort mal édifié de ce que vous ne mettez dans la plupart de vos relations que des nouvelles générales, qui le plus souvent m'importent fort peu, sans que vous touchiez un mot des affaires graves dont je vous ai chargé, et d'autres choses qui me pourront être bien plus intéressantes que tout ce petit détail dont vous faites l'unique objet de vos relations. Vous devriez faire l'un, sans négliger l'autre, et ne pas laisser passer dans un temps si critique comme celui-ci un seul jour de poste, sans me mander quelque chose d'intéressant. Pour vous mettre donc en voie comment je veux que vous me fassiez vos relations, je vous dirai qu'après m'avoir marqué l'état où sont les affaires que je vous ai commises, vous devez entrer encore dans d'autres détails sur des affaires qui ont du rapport à mes intérêts et que vous devez tâcher à bien approfondir : savoir ce que le ministère anglais pense sur la Diète qu'on va tenir en Suède, de même que sur les armements présents de la Russie; si la Grande-Bretagne y entre pour quelque chose, si elle fournit sous main de l'argent à la Russie pour l'aider à faire ces démonstrations-là, et si son idée est de me brider et me tenir en échec par là, afin que je ne puisse pas remuer, ou si elle en a d'autres vues plus vastes. Si les Anglais sont piqués contre la cour de Dresde, parceque celle-ci a fait un traité de subsides avec la France, pour observer une exacte neutralité pendant cette guerre-ci et pour ne point donner de troupes à ses ennemis. Si le roi d'Angleterre est aussi piqué que la nation contre la cour de Vienne de ce que celle-ci a envoyé le prince Charles aux Pays-Bas pour y commander l'armée alliée. Si le ministère anglais a de la confiance en moi ou non. Si les relations que son ministre à ma cour, le sieur de Villiers, fait, me sont favorables ou non, et quelles impressions elles font sur le ministère. Si vous êtes persuadé qu'on tiendra fermement à la convention d'Hanovre et me soutiendra dans la possession de la Silésie, ou si l'on n'a fait cette con<158>vention que pour avoir, dans les circonstances pressées où on était alors, un ennemi de moins, mais qu'à présent que le péril est passé, on se soucie peu des engagements qu'on a pris par ladite convention, et qu'au contraire on aimerait mieux que la reine de Hongrie puisse revendiquer la Silésie. Si le ministre anglais à Vienne, le sieur Robinson, est partial et fort porté pour la reine de Hongrie dans les relations qu'il fait à sa cour. Si vous croyez que le roi d'Angleterre soutiendra son engagement pris par la convention d'Hanovre et par le traité de Dresde, pour me procurer la garantie de la Hollande et de l'Empire sur ces traités. Si le roi d'Angleterre est encore personnellement aigri contre moi. S'il préfère actuellement encore les sentiments du ministère d'Hanovre à ceux de ses ministres anglais, et jusqu'où vous croyez que les affaires d'Hanovre aient de l'influence dans celles d'Angleterre. Si milord Carteret continue encore d'avoir de l'influence dans les affaires d'Angleterre.

Voilà les affaires sur lesquelles vous devez vous appliquer à les approfondir, pour m'en faire des relations plus intéressantes que celles que vous m'avez faites, et où il n'y a eu souvent que des bagatelles qui méritent à peine d'être lues.

Federic.

Nach dem Concept.