2354. AU CONSEILLER ANDRIÉ A LONDRES.

Potsdam, 27 septembre 1746.

J'ai reçu la dépêche que vous m'avez faite en date du 16 de ce mois. Sur ce qui est de cet homme dont milord Harrington vous a dit que le sieur Robinson lui avait marqué qu'il était survenu une nouvelle difficulté entre moi et la cour de Vienne au sujet de cette per<196>sonne, vous aurez déjà vu, par le rescrit que je vous ai fait faire196-1 en date du 6 de ce mois, de quoi il s'agit là-dessus, et que c'est un comte de Henckel qui non seulement a été mon vassal, mais qui avait été outre cela actuellement en mon service, ayant été président de la justice supérieure en la Haute-Silésie. Cet homme-là, par un mouvement de la plus noire perfidie, et sans que je lui avais donné le moindre sujet de mécontentement, ayant déserté son poste du temps de l'invasion des Autrichiens dans la Haute-Silésie, suivit le parti de mes ennemis d'alors, à qui ce traître suppédita tout ce qu'il pouvait imaginer pour désoler et ruiner le pauvre pays. C'est pour quoi son procès lui fut loyalement fait à Breslau, dans lequel il fut jugé par contumace et declaré convaincu de haute trahison; ses biens furent confisqués, et lui déclaré infâme. Comme vous êtes amplement instruit du reste par le rescrit ci-dessus allégué, je n'ajouterai plus rien, sinon que, quand on vous devrait encore parler sur ce sujet-là, vous devez toujours appuyer à un parallèle entre cet homme et les rebelles écossais, et que j'avais autant de raison d'en faire un exemple, que les Anglais avaient d'en faire des rebelles écossais; que d'ailleurs l'amnistie générale stipulée dans la paix de Dresde ne cadrait point sur un traître insigne qui avait été en mon service, et que, si la cour de Vienne prétendait statuer le contraire, elle n'avait qu'à prendre une bonne leçon sur ce qui était arrivé, lorsque le marquis d'Argenson fit écrire au duc de Newcastle par le ministre hollandais à Paris en faveur des rebelles écossais.

Quant à la réponse que milord Harrington vous a donnée touchant la demande que je lui ai fait faire, s'il croyait qu'il me convenait d'envoyer quelque ministre au congrès de Breda, j'en suis fort satisfait;196-2 aussi vous ordonné-je que vous en deviez faire un compliment très obligeant de ma part à ce milord, en ajoutant que la confiance que j'avais en lui et en ses grandes lumières, était si parfaite et jusqu'au point que je me concerterais volontiers avec lui sur toutes mes affaires d'importance et que je le priais qu'il voulût à son tour avoir une confiance entière à moi, et qu'il verrait alors qu'en tout temps et dans toutes les circonstances il m'aurait pour son ami véritable; qu'au surplus je le priais que, si l'Angleterre parvenait à faire sa paix particulière avèc l'Espagne, il voulût bien contribuer afin que je sois inclu dans cette paix-là, pour rassurer d'autant mieux par là la tranquillité que l'Angleterre veut entretenir dans ces cantons-ci. Vous vous acquitterez avec beaucoup d'adresse de cette commission que je vous donne, et n'oublierez pas de me faire un rapport exact de ce que Milord vous aura répondu là-dessus.

Federic.

Nach dem Concept.

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196-1 Durch das Ministerium.

196-2 Harrington hatte dem Gesandten erklärt: „Qu'il approuvait extrêmement l'idée de Votre Majesté à cet égard, mais qu'en attendant je pouvais assurer Votre Majesté qu'il m'avertirait en confidence du temps qu'il croirait nécessaire que Votre Majesté prît une telle résolution.“