2357. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS, ENVOYÉ EXTRAORDINAIRE, A VIENNE.

Potsdam, 30 septembre 1746.

J'ai bien reçu la relation que vous m'avez faite en date du 23 de ce mois. Je suis très content et plus satisfait de cette relation que je n'ai été de toutes les autres que vous m'avez faites, puisque vous y entrez dans un plus grand détail; et les affaires de cette conséquence demandent toujours qu'on en ait connaissance jusques aux minuties; ce qui vous doit servir de règle dans le détail de toutes les grandes affaires que vous serez obligé de me faire.

Les mouvements que les Autrichiens vont faire à présent, se font assurément dans l'intention de mettre leurs États à l'abri de toute insulte; ils supposent que les changements de quartiers de mes troupes en Silésie contiennent quelque mystère, et c'est là l'unique raison de la conduite qu'ils tiennent jusqu'à présent. Vous devez savoir que les matériaux pour la paix générale ne sont pas encore préparés au point que nous puissions en attendre la conclusion entre ici et le printemps. Les esprits sont trop animés, et la haine sincère que le roi d'Angleterre nourrit contre les Français, me donne tout lieu à croire qu'il fera tous les efforts, dans la campagne qui vient, pour se procurer sur cette couronne les avantages dont il se flatte. Vous ne devez point être étonné<199> de la différence que le roi d'Angleterre met entre le traité de Breslau et entre le traité de Dresde. L'acquisition que j'ai faite de la principauté d'Ostfrise après la paix de Breslau, et sur laquelle le roi d'Angleterre, comme électeur d'Hanovre, croit avoir des droits, a fait naître des inconvénients, et pour que l'Ostfrise soit eximée de la garantie générale de mes États, il distingue le traité de Breslau, où cette garantie n'est point comprise, de celui de Dresde, où elle se trouve stipulée. Ceci vous donnera la clef de bien des problemes, et pour vous confirmer en ce que je viens de vous dire, vous n'avez qu'à tâter adroitement le sieur Robinson, qui s'échappera sûrement dans sa vivacité.

Quant aux affaires de Russie, vous devez savoir que je me promets beaucoup du retour du Vice-Chancelier; il faudra voir s'il pourra gagner une supériorité entière contre son adversaire, le comte Bestushew, ou si, du moins, il pourra mettre des entraves à sa mauvaise volonté. Pour le présent, j'ai tout lieu à croire que Bestushew a jeté son premier feu, et que les dépenses d'une armée assemblée depuis cinq mois en Livonie, devenant trop onéreuses à cette puissance, lui ont inspiré les desseins pacifiques de renvoyer les troupes dans leurs anciens quartiers.

Quant à Wilczek, Henckel et les autres correspondants de la Silésie, je me persuadé de plus en plus que l'objet de leur correspondance roule, la plupart, sur des affaires particulières, et que beaucoup de mauvaise volonté se trouve joint à beaucoup d'impuissance.

Le caractère de la reine de Hongrie est assurément tel que vous le représentez, mais il y a un chemin infini du vouloir au parfaire, et je ne manque pas encore des moyens pour prévenir à temps les mauvais desseins que cette cour ourdit contre moi. En attendant, je vous recommande d'être vigilant sur sa conduite et de témoigner en public beaucoup d'indifférence sur la bonne ou mauvaise volonté de la Reine, mais d'essayer, s'il se peut, de gagner la confiance de l'Empereur, et peut-être trouverez-vous quelque canal chez l'Impératrice douairière qui vous en pourra faciliter les moyens.

Federic.

Nach dem Concept.