2734. AU CONSEILLER BARON LE CHAMBRIER A SAINT-TROND.

Charlottenbourg, 8 août 1747.

J'ai bien reçu la dépêche que vous m'avez faite le 31 du mois passé de juillet. Sur ce qui regarde l'entretien que vous avez eu avec le marquis de Puyzieulx, je dois vous dire que tout ce que nous pourrons désirer de la France dans le moment présent à l'égard de la Saxe, c'est que la première ne se laisse pas trop étourdir ni trop entraîner de la Saxe, ce qui doit nous suffire présentement. Si la France peut lier les mains à la Saxe moyennant quelque somme modique d'argent, je suis toujours du sentiment que la première ne doit point laisser échapper celle-ci pour cela, mais qu'elle doit plutôt tâcher de s'en accommoder avec la Saxe et de ne la laisser point échapper. Comme je sais d'ailleurs de bon endroit que le roi de Pologne se trouve fort flatté lorsque le roi de France lui fait quelquefois des lettres de politesse de sa main propre, je crois que, si Sa Majesté Très Chrétienne lui en faisait de temps en temps, elles feraient beaucoup d'impression sur l'esprit du roi de Pologne et le tiendraient d'autant plus attaché aux intérêts et aux vues de la France.

Vous devez faire observer tout ceci au marquis de Puyzieulx, et vous remarquerez vous-même à cette occasion que, s'il y a de l'aigreur<458> entre la cour de Dresde et moi, ce n'est point de ma faute, ayant prévenu, et prévenant encore, celle-ci en tout ce qui lui peut agréable, depuis le temps que j'ai conseillé à la France d'accepter une des filles du roi de Pologne pour la marier au Dauphin, jusqu'à ce moment-ci.

Quant à l'échec que les Français ont eu en Italie, je serais extrêmement surpris si, pour une affaire de pareille nature, ils abandonneraient encore l'entreprise d'entrer en Italie et d'y soutenir ses amis et alliés. Si les Français en ressortent après le progrès qu'ils y ont fait, ils se perdront de réputation auprès de tout le monde, et, dans des occasions comme celles-ci, il faut indispensablement qu'ils passent sur tous les contre-temps qui leur puissent arriver. Pour ce qui est du siége de Berg-op-Zoom, vous verrez qu'ils y réussiront.

Au reste, je vous recommande fort l'affaire de l'accommodement à tenter entre la Suède et le Danemark; les dépêches précédentes que je vous ai faites à ce sujet, et celles que vous recevrez encore de mes ministres du département des affaires étrangères, vous auront mis assez au fait de quoi il s'agit; et comme le ministre de Danemark vient encore de se déclarer à mon chargé d'affaires à Copenhague qu'on va découvrir ses intentions là-dessus au ministre de France, le sieur Lemaire, vous appuierez fort auprès du marquis de Puyzieulx pour qu'on instruise le sieur Lemaire à seconder de son mieux cette affaire. Je réitère encore ici les ordres que je vous ai donnés par rapport aux instances à faire auprès du marquis de Puyzieulx de ne rien confier de cette affaire au sieur de Bernstorff, qui, vendu qu'il est à la cour d'Hanovre, ne laisserait que de la gâter par les faibles ou les faux rapports qu'il en fera à sa cour, au lieu que, si la France fait passer cette négociation par les mains du sieur Lemaire, l'on en pourra espérer du succès.

Federic.

Nach dem Concept.