2740. AU CONSEILLER BARON LE CHAMBRIER A SAINT-TROND.

Potsdam, 15 août 1747.

La dépêche que vous m'avez faite du 7 de ce mois, m'a été bien rendue. Comme le marquis de Puyzieulx vous a fait entendre que, sans que la France soit invitée à mon traité d'alliance avec la Suède comme partie principale contractante, elle ne ratifierait pas ce que le comte de Lanmary a promis aux Suédois relativement aux subsides à leur payer, vous devez lui répondre fort honnêtement et en des termes très polis que je n'étais pas, moi, proprement intéressé a ce que la Suède reçût des subsides de la France, mais quand même cela aurait directement du rapport à moi, les raisons que je lui avais fait expliquer pourquoi je ne saurais me prêter dans ce point-ci aux désirs de la France, étaient si vraies, si solides et si constatées que, malgré toute la bonne volonté que j'en eusse, je ne saurais changer de sentiment. Comme vous êtes assez au fait de toutes ces raisons-là, vous devez les lui détailler encore une fois tout au long. Vous ajouterez alors qu'il me semblait que la France gagnait toujours quand elle donnerait à la Suède les subsides que le comte de Lanmary lui avait promis, puisqu'il était sûr qu'en défaut des subsides de la France la Suède se verrait obligée d'en accepter de l'Angleterre, qui ne manquerait pas d'en donner à celle-là, pour l'avoir dans son système et pour avoir des troupes de celle-ci. Que d'ailleurs je regardais de mon côté comme la plus haute folie du monde la vanité du pas, des droits de préséance et de l'avantage de signer à droite ou à gauche dans un traité, et que je méprisais si fort ces choses que je n'avais point fait difficulté là-dessus lorsque j'avais fait des alliances avec la France;463-2 qu'au surplus, s'il s'agissait d'une alliance offensive, je ne disputerais pas un moment avec la France, mais comme il s'agissait d'une alliance défensive, le cas changeait entièrement et les conjonctures ne me permettaient absolument pas de me prêter à leur désir. Que si la France avait envie de faire une alliance avec la<464> Suède où elle soit la partie principale, elle pourrait prendre des engagements séparés avec la Suède; que je ne m'y opposerais point, mais, quant au genre de l'invitation de cette alliance-ci, la France n'avait aucune bonne raison de me faire dire des reproches là-dessus, à cause que l'objet de mon alliance avec la Suède était la défensive, et que tout article qui pourrait la faire changer d'objet ou qui pourrait directement ou indirectement me brouiller avec mes voisins, renverserait le but que je m'étais proposé de la défensive et mettrait en contradiction mes actions et mes discours. Voilà ce que vous devez insinuer convenablement au marquis de Puyzieulx, et je suis trop persuadé de sa pénétration et de ses lumières pour douter que cela ne dût faire de l'impression sur son esprit. Aussi attends-je votre rapport détaillé de quelle manière il se sera expliqué là-dessus.

Federic.

Nach dem Concept.



463-2 Vergl. Bd. I, 256.