<378>vention sur l'entretien d'un corps de 30,000 hommes troupes russiennes en Livonie n'était point encore renouvelée, et qu'il doutait fort que les puissances intéressées eussent envie de renouveler à cet égard leurs engagements, d'autant plus qu'elles étaient trop aises de se voir déchargées du fardeau de ces conditions onéreuses, pour vouloir sans aucune nécessité apparente l'endosser de nouveau, et que le ministre de Hollande en Russie, qui avait débité cette nouvelle, avait voulu apparemment en imposer. D'ailleurs je vous fais communiquer par une dépêche d'aujourd'hui du département des affaires étrangères la déclaration que la cour de Russie a fait faire par son ministre à Stockholm au ministère de Suède, démarche qui me rassure en quelque façon des ombrages où j'ai été, comme si la cour de Russie voulait changer la succession établie en Suède. Mais quand je considère d'un autre côté que la Russie peut avoir un autre but dans tout ceci, quand je combine ce que je vous fais communiquer, encore, par le département des affaires étrangères par rapport aux arrangements que la cour de Vienne fait actuellement avec beaucoup de chaleur par rapport à son militaire, et à la peine que l'Empereur et l'Impératrice se donnent pour faire argent de tout, de même que touchant ses autres arrangements, qui indiquent tous qu'il y a de grands desseins sur le tapis; quand il est vrai encore, ce que mes lettres de Hollande m'apprennent, qu'il y a une triple alliance conclue entre les cours de Londres, de Pétersbourg et de Vienne, et que le traité en est signé — j'avoue qu'il y a une complcation de circonstances que je ne sais point démêler encore, et qui, en attendant, ne laissent pas de donner bien des soupçons. Avec tout cela, je crois que, si la cour de Londres abandonne une fois ses vues ambitieuses, la Russie et le reste de ses alliés ne voudront point commencer le branle, et que, si l'intention du roi d'Angleterre n'est point de placer son fils, le duc de Cumberland, au trône de la Suède, il n'y aura point de guerre à craindre dans le Nord; mais que, si au contraire le roi d'Angleterre couche cet établissement pour son fils, alors la guerre sera inévitable, qui mettra toute l'Europe en combustion.

Vous ne laisserez pas de communiquer convenablement ces considérations au marquis de Puyzieulx, en ajoutant par manière de confidence que, si malheureusement une guerre devait commencer entre la Suède et la Russie, mes affaires n'étaient point encore arrangées de façon que je puisse y prendre part d'abord, et qu'il me faudrait, au moins, une année de temps encore avant que je sois à même de faire des démonstrations de diversion aux ennemis de la Suède.

A cette occasion, je veux bien vous dire, quoique dans le dernier secret et uniquement pour votre direction, que je fais faire ces insinuations-là au marquis de Puyzieulx pour le prévenir, afin qu'au cas d'une rupture entre la' Suède et la Russie la France ne me demande point de m'en mêler d'abord ni de me jeter en avant, et vous pouvez compter que, si cette guerre funeste devait avoir lieu, je me tiendrai