3664. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS, ENVOYÉ EXTRAORDINAIRE, A VIENNE.

Potsdam, 20 mai 1749.

Le sieur von der Hellen m'ayant marqué votre arrivée à Vienne par la relation qu'il m'a faite du 10 de ce mois, je vous ai fait communiquer par un rescrit du département des affaires étrangères ce qu'il m'est revenu par mes dernières lettres de Londres par rapport à l'embarras que le duc de Newcastle a témoigné quand il s'est agi de communiquer au ministre de France à Londres le contenu des dépêches qu'un courrier de Russie y a apportées en dernier lieu, embarras qui<534> me paraît d'autant plus étrange que mes lettres de Moscou m'apprennent qu'il y avait toute apparence que la cour de Russie ne pensait actuellement plus à l'exécution de quelque grand dessein, vu que tous les arrangements qu'on y faisait, annonçaient assez qu'on ne songeait pas à retourner si tôt à Pétersbourg, qu'on bâtissait à Moscou des palais, qu'on faisait des provisions et faisait transporter de Pétersbourg les carrosses de parade et les chevaux qu'on avait laissés dans cette ville-ci, et qu'on ne doutait plus que l'Impératrice n'irait faire, au printemps de l'année qui vient, un voyage à Kiovie.

Au surplus, je dois vous avertir que le chancelier comte Ulfeld est bien piqué contre vous, parcequ'il vous regarde comme celui qui a commencé à m'avertir de ce qu'il y pourrait être anguille sous roche dans la manœuvre entre les deux cours impériales, avis que je vous fais uniquement pour que vous puissiez vous diriger d'autant mieux avec lui, sans faire semblant d'en savoir la moindre chose. Je vous dirai d'ailleurs que je sais de bonne main que les deux cours impériales sont aussi outrées contre moi de ce que j'ai éveillé un peu la France contre les vastes et pernicieux desseins que ces deux cours couvaient dans l'espérance qu'elles cacheraient si bien leur jeu que la France s'endormirait et n'y verrait pas de si près, avant qu'elles eussent fait leur coup. Aussi veulent-elles particulièrement prendre à tâche à présent de faire jouer tous les ressorts possibles afin de mettre de la désunion entre la France et moi.

Federic.

Nach dem Concept.