<171> mais les forces d'un des plus grands rois de l'Europe qui aurait voulu résister à l'impétuosité de ce torrent. Il n'est pas besoin de vous faire remarquer la maxime qu'ils ont adoptée généralement, d'attirer par diversion nos forces d'un côté, pour frapper un grand coup à l'endroit où ils sont sûrs de ne pas trouver de résistance; de se tenir sur la défensive vis-à-vis d'un corps assez fort pour leur tenir tête, et d'employer la vigueur contre celui que sa faiblesse oblige de céder.

Je ne vous rappelle pas non plus la méthode dont je me suis servi pour me soutenir contre ce colosse, qui menaçait de m'accabler. Cette méthode, qui ne s'est trouvée bonne que par les fautes de mes ennemis, par leur lenteur qui a secondé mon activité, par leur indolence à ne jamais profiter de l'occasion, ne doit point se proposer pour modèle.

La loi impérieuse de la nécessité m'a obligé à donner beaucoup au hasard. La conduite d'un pilote qui se livre aux caprices du vent plus qu'à la direction de sa boussole ne peut jamais servir de règle.

Il est question de se faire une juste idée du système que les Autrichiens suivent dans cette guerre. Je m'attache à eux comme à ceux de nos ennemis qui ont mis le plus d'art et de perfection dans ce métier. Je passe sous silence les Français, quoiqu'ils soient avisés et entendus, parce que leur inconséquence et leur esprit de légèreté renverse d'un jour à l'autre ce que leur habileté leur pouvait procurer d'avantages. Pour les Russes, aussi féroces qu'ineptes, ils ne méritent pas qu'on les nomme.

Les changements principaux que je remarque dans la conduite des généraux autrichiens pendant cette guerre consistent dans leurs campements, dans leurs marches, et dans cette prodigieuse artillerie qui, exécutée seule, sans être soutenue de troupes, serait presque suffisante pour repousser, détruire et abîmer un corps qui se présenterait pour l'attaquer. Ne pensez pas que j'ignore les bons camps