<133> contemporains à côté des contemporains; et pour que la mémoire soit moins chargée de dates, il serait bon de fixer les époques où les révolutions les plus importantes sont arrivées : ce sont autant de points d'appui pour la mémoire, qui se retiennent facilement, et qui empêchent que cet immense chaos d'histoires ne s'embrouille dans la tête des jeunes gens.

Un cours d'histoire tel que je le propose, doit être bien digéré, profondément pensé, et exempt de toute minutie. Ce n'est ni le Theatrum europaeum, ni l'Histoire des Germains de M. de Bünau que le professeur doit consulter; j'aimerais mieux l'adresser aux cahiers de Thomasius, s'il s'en trouve encore. Quel spectacle plus intéressant, plus instructif et plus nécessaire pour un jeune homme qui doit entrer dans le monde, que de repasser cette suite de vicissitudes qui ont changé si souvent la face de l'univers! Où apprendra-t-il mieux à connaître le néant des choses humaines qu'en se promenant sur les ruines des royaumes et des plus vastes empires? Mais, dans cet amas de crimes qu'on lui fait passer devant les yeux, quel plaisir pour lui de trouver de loin en loin de ces âmes vertueuses et divines qui semblent demander grâce pour la perversité de l'espèce! Ce sont les modèles qu'il doit suivre. Il a vu une foule d'hommes heureux environnés d'adulateurs : la mort frappe l'idole, les flatteurs s'enfuient, la vérité paraît, et les cris de l'abomination publique étouffent la voix des panégyristes. Je me flatte que le professeur aura assez de sens pour marquer à ses disciples les bornes qui distinguent une noble émulation d'avec celles d'une ambition démesurée, et qu'il les fera réfléchir sur tant de passions funestes qui ont entraîné les malheurs des plus vastes États; il leur prouvera par cent exemples que les bonnes mœurs ont été les vraies gardiennes des empires, ainsi que leur corruption, l'introduction du luxe et l'amour démesuré des richesses ont été de tout temps les précurseurs de leur chute. Si M. le professeur suit le plan que je propose, il ne se bornera pas à entasser