<32>5. DES CAMPS DÉFENSIFS.

Je vais parler à présent de ces camps défensifs qui ne sont forts que par le terrain, et qui n'ont d'autre objet que d'empêcher l'ennemi de vous attaquer.

Lorsque ces situations doivent répondre parfaitement à l'usage que l'on en veut faire, il faut que le front et les deux côtés soient d'une force égale, et le derrière ouvert et libre. Ce sont des hauteurs qui ont le front escarpé et les flancs couverts de marais, comme celui de Marschowitz, où se tint le prince de Lorraine,b ou bien couverts d'un ruisseau de marais par le front et d'étangs par les flancs, comme était celui de Konopischt,c où nous campâmes l'année 1744; ou bien l'on se met sous la protection d'une place forte, comme M. de Neipperg, qui choisit, après la perte de la bataille de Mollwitz, un camp admirable auprès de Neisse. Il est vrai qu'un général qui choisit des camps forts est inattaquable pendant qu'il s'y tient; mais lorsque l'ennemi fait des marches pour le tourner, il est obligé de quitter son poste. Ainsi un général qui veut faire la défensive en prenant des camps forts en doit avoir un choix tout fait, pour n'avoir besoin que de marcher dans un autre camp fort sur ses derrières, dès que l'ennemi le tourne. La Bohême est le pays des camps forts; on est obligé d'en prendre là par force, parce que la nature a fait de ce royaume un pays de chicane. Je le répète encore, qu'un général y prenne bien garde, et qu'il ne tombe pas dans une faute irréparable par le choix vicieux de ses postes, et qu'il ne se mette pas dans un cul-de-sac, dans un terrain où il ne peut entrer que par un défilé. Si l'ennemi est habile, il l'y renfermera, et, ne pouvant combattre faute de terrain, il essuiera la plus grande ignominie qui puisse arriver à un homme de guerre, c'est-à-dire, de mettre les armes bas sans pouvoir se défendre.


b Voyez t. III, p. 72.

c L. c., p. 71 et 72.