<330>ment aperçu par ce que le comte d'Affry a lu au sieur de Yorke d'une dépêche du duc de Choiseul et de la réponse de la cour de France,1 que cette cour ne songe qu'à faire illusion à l'Angleterre et de ne lui point accorder ces cessions aux Indes que l'intérêt de la nation anglaise demande de lui stipuler, de sorte qu'on pénètre aisément que toute cette négociation échouera encore. Et comme, d'ailleurs, les Français déclinent entièrement mon inclusion formelle et préalable dans la paix qui se doit faire avec l'Angleterre, je ne serai jamais si insensé que de travailler et contribuer à une chose dont les suites ne sauraient qu'entraîner absolument ma perte entière.

C'est pourquoi aussi vous emploierez avec le sieur Michell toute votre adresse et prudence pour contribuer, autant que [vous] trouverez les moyens, pour que ce chipotage avec la France finisse et n'arrête plus les autres moyens efficaces que l'Angleterre a en mains pour forcer la France de se prêter à des conditions plus raisonnables et telles que sa situation présente les demande. Vous tâcherez, en conséquence, de contribuer au mieux à cet effet et d'insinuer à M. Pitt que, pour finir une bonne fois ce chipotage artificieux de la France, qui ne tend à autre fin que de mettre de la désunion et de discorde en Angleterre, de gagner du temps pour parvenir à la duper, il n'aurait qu'à s'expliquer sur les conditions par rapport aux cessions à faire de la France touchant les intérêts les plus essentiels à la nation, que la cour de France refusera, et que par là ce chipotage dangereux soit rompu. Vous pousserez plutôt auprès de M. Pitt, autant que vous le trouverez faisable, qu'au lieu de s'amuser frivolement avec cette négociation, que les Anglais ne perdent plus le temps le plus propre pour agir vivement par mer contre la France, de presser l'envoi de leurs flottes — dont depuis bien du temps vous ne m'avez plus rien marqué — : sans quoi, je suis persuadé que l'Angleterre regrettera bien tout retard de ses flottes, au lieu que, si elle presse vivement les Français aux Indes et à la Martinique, et qu'on menace les côtes de la France par-ci par-là par des débarquements, il n'est du tout douteux qu'entre ici et six mois les Français viendront lui demander la paix à genoux.

Pour ce qui regarde ma négociation à Constantinople,2 je ne dois pas vous dissimuler qu'autant qu'on peut avoir humainement des assurances sûres sur la réussite d'une affaire, je dois me flatter de celles que la Porte m'en a données qu'elle rompra avec les deux cours impériales pour faire une diversion en ma faveur. Ce n'est pas une prédilection pour moi, mais que la Porte envisage en ceci leurs3 vrais intérêts par l'appât qu'ils3 trouvent de pouvoir reconquérir le Banat en Hongrie, et par la juste appréhension que, si les deux cours impériales m'écrasent et gagnent par là et par l'oppression de l'empire en Allemagne trop de forces sur elle, qu'elle en sera en suite la victime et n'aura que le



1 Vergl. Nr. 12032.

2 Vergl. S. 322.

3 So.