<22>Le maréchal de Noailles, après avoir passé une partie de cette campagne derrière le Speyerbach, abandonna cette position pour se rapprocher de Landau, et se trouver à portée de joindre le maréchal de Coigny, qui avait pris le commandement des troupes du vieux Broglie, au cas que le prince de Lorraine forçât le passage du Rhin et pénétrât en Alsace. Le roi George suivit les Français jusqu'au Speyerbach, où il termina les opérations de cette campagne, après avoir fait raser les lignes que les Français avaient fait construire sur ses bords. Il retourna à Hanovre, et les troupes prirent des quartiers dans le Brabant et dans l'évêché de Münster. George, pendant son séjour à Hanovre, maria sa fille Marie avec le prince royal de Danemark; après quoi, il prit le chemin de Londres, pour y faire à son parlement, dans une harangue pompeuse, le récit de ses exploits.
Pour se convaincre du peu de suite qu'il y a dans les actions des hommes, il n'y a qu'à faire l'analyse de cette campagne. On assemble une armée sur le Main, sans pourvoir à ses subsistances; la faim et la surprise obligent les alliés à se battre; ils sont vainqueurs des Français; ils passent le Rhin; ils vont à Worms; le Speyerbach les arrête, sans qu'ils trouvent des expédients pour en déposter les ennemis; ils avancent enfin sur le Speyerbach, que M. de Noailles leur abandonne, et ils ne reçoivent les secours des Hollandais que pour prendre des quartiers d'hiver dans le Brabant et dans la Westphalie. Rien n'est conséquent dans cette conduite : elle ressemble à l'opération d'un chimiste qui, cherchant la pierre philosophale, trouve une couleur dont il pouvait, se passer. Ce n'est point dans l'intention de critiquer la conduite du roi d'Angleterre que nous faisons ces réflexions, car bien d'autres généraux en ont fait autant, mais seulement pour convaincre les lecteurs que l'espèce humaine n'est pas aussi raisonnable qu'on voudrait le persuader.
Le peu de succès qu'eurent les Autrichiens et les Anglais dans cette campagne de 1743, donna aux Français le temps de se recon-