<54>Dès le 2 de juillet, le prince de Lorraine se vit maître du cours du Rhin depuis Schröck jusqu'à Mayence. Nadasdy et le prince de Waldeck étaient déjà à l'autre bord. Bärenklau avait de même passé ce fleuve du côté de Mayence. Le prince de Lorraine employa trois jours à passer ses ponts avec la grande armée. A peine y eut-il une tête à l'autre bord, qu'il envoya un détachement pour prendre Lauterbourg et s'emparer de ses lignes. Nadasdy poussa jusqu'à Weissenbourg : il le prit de même, et se posta dans ses lignes; les Autrichiens firent seize cents prisonniers dans cette expédition. M. de Coigny s'aperçut alors combien il lui importait de gagner la Basse-Alsace avant le prince de Lorraine, et il le prévint en prenant Weissenbourg par escalade, et en forçant les retranchements, où il éprouva une résistance vigoureuse. Nadasdy, forcé dans ce poste, se retira sur la grande armée qui campait auprès de Lauterbourg, et qui n'osa secourir Weissenbourg, parce que les détachements de Bärenklau et de Léopold Daun ne l'avaient pas encore jointe. M. de Coigny tira parti de ces délais, et de la crue du Rhin, qui empêchait la jonction des corps ennemis : il marcha sur la Sauer, passa la Motter auprès de Haguenau, et se campa à Bischweiler.
L'éloignement de M. de Coigny fit naître l'idée au prince de Lorraine de bloquer Fort-Louis, qu'on disait mal approvisionné. En conséquence, Nadasdy et Bärenklau prirent poste à Wörth,5 à Beinheim et sur les îles qui entourent Fort-Louis. Une crue du Rhin sauva cette place : la garnison regagna la communication de Strasbourg; on la renforça, et on la pourvut de vivres. Ce coup manqué, le prince de Lorraine porta ses troupes légères sur les ailes de l'armée française, et dans le bois de Haguenau, ce qui empêchait celle-ci d'envoyer des partis au delà de la Motter. Le maréchal de Coigny embarrassé de la situation où il se trouvait, en avait informé la cour. Louis XV, pour sauver l'Alsace, résolut de mener lui-même quarante
5 12 juillet.