<62>Le Roi arriva le 2 de septembre auprès de Prague avec tous les corps qui composaient son armée : il se campa près de la chapelle de la Victoire; le maréchal de Schwerin et le prince Léopold investirent ce qu'on appelle le Grand-Côté de la ville. Il fallut huit jours pour transporter de Leitmeritz au camp la grosse artillerie et les vivres. Leitmeritz reçut un bataillon en garnison, pour veiller à la sûreté des magasins, qu'on ne pouvait pas faire avancer, faute de chevaux; car la Moldau, qui se jette à cet endroit dans l'Elbe,a n'est point navigable : ce temps fut employé à faire tous les préparatifs du siège. Dans cet intervalle on fut informé par des espions, que M. de Batthyani assemblait un gros magasin dans la ville de Béraun; des hussards qu'on détacha pour reconnaître les chemins qui mènent à cette ville, confirmèrent le même rapport. L'envie d'enlever ce magasin tenta le Roi; il détacha le général Hacke avec cinq bataillons et six cents hussards pour s'en emparer. M. de Batthyani en eut vent, quoiqu'on eût pris toutes les précautions possibles pour que le secret fût gardé. Batthyani renforça ce poste; et lorsque M. de Hacke passa le pont de Béraun, et qu'il eut forcé la porte de la ville, il aperçut deux gros corps de cavalerie qui passaient la rivière à sa droite et à sa gauche pour tomber sur ses deux flancs. Il abandonna aussitôt l'attaque, et se posta sur des hauteurs, où il forma un quarré de son infanterie. Il fut vivement attaqué par cette cavalerie et par un gros corps d'infanterie hongroise; il trouva le moyen de faire savoir au camp de Prague le danger où il se trouvait : le Roi, en l'apprenant, vola à son secours avec quatre-vingts escadrons et seize bataillons; mais M. de Hacke avait vaillamment repoussé les ennemis, et s'était dégagé lui-même avant que le secours pût le joindre. Le projet sur Béraun manqua ainsi, et M. de Batthyani fit transporter en hâte son magasin de cette ville à Pilsen. Il aurait fallu sans doute retourner à Béraun, chasser M. de Batthyani de Pilsen, et lui enlever son maga-
a La Moldau se jette dans l'Elbe vis-à-vis de Melnik; l'Éger, vis-à-vis de Leitmeritz.