<197> mêmes malheurs que les Suédois y avaient éprouvés. La peste, qui fit des ravages extraordinaires à Oczakow, l'obligea d'abandonner cette ville, et Lacy ne put faire aucun progrès dans la Crimée.

La mauvaise tournure que prit la guerre de Hongrie, abattait l'esprit de l'Empereur. Il regretta le grand Eugène, mort en 1737,a auquel il devait la gloire de son règne : « la fortune de l'État, disait-il, est-elle donc morte avec ce héros? » Mais aigri des malheurs de la guerre, il s'en prit à ses généraux : Seckendorff fut mis en prison au château de Grätz, et Königsegg eut en Hongrie le commandement de l'armée.

Les Impériaux furent battus en plusieurs rencontres. Les Turcs prirent le vieux Orsowa et Mehadia. Ils mirent le siége devant le nouvel Orsowa, qu'ils levèrent ayant été repoussés à Cornia : mais Königsegg, qui se retira mal à propos après sa victoire, leur donna le moyen de recommencer ce siége. Le nouvel Orsowa ne tint pas longtemps, et les Turcs y prirent tout le gros canon de l'Empereur. Il se donna encore une bataille auprès de Mehadia, aussi peu décisive que la première, où les Impériaux eurent le dessous. L'Empereur, irrité de ses pertes, ne savait à qui s'en prendre; il punissait ses généraux, mais c'étaient les projets de campagne qu'il devait réprouver.

L'expérience a fait voir, dans les guerres de Hongrie, que toutes les armées qui se sont éloignées du Danube ont été malheureuses, à cause qu'elles s'éloignaient en même temps de leur subsistance. Lorsqu'Eugène fit la guerre contre les Turcs, il ne sépara jamais son armée; et, dans ces temps modernes, l'envie qu'avaient les généraux en crédit à la cour de commander des corps séparés, fit que toute l'armée, étant en détachements, n'était nulle part formidable. Les vieilles maximes étaient négligées, et les généraux étaient d'autant plus à plaindre, que la cour les jetait dans des incertitudes perpétuelles par le nombre d'ordres contradictoires qu'elle leur envoyait.


a Mort en 1736, le 21 avril.