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ÉPOQUE PREMIÈRE.

Dans la longue énumération que Tacite fait des peuples d'Allemagne, il s'est trompé sur le mot d'Ingevoner, qui signifie habitants; et sur celui de Germanier, qui veut dire gens de guerre, que l'ignorance de la langue lui fait prendre pour des nations particulières : la quantité de ces guerriers dont l'Allemagne était remplie, lui donna le nom de Germanie.

Les premiers habitants de la Marche furent des Teutons, et après eux les Semnons, dont Tacite dit que c'étaient les plus nobles d'entre les Suèves.

Dans ces temps reculés, l'Allemagne était tout à fait barbare; les peuples, grossiers et à moitié sauvages, habitaient les forêts; de mauvaises cabanes leur servaient de demeures; ils se mariaient jeunes, et peuplaient d'autant plus que les femmes étaient rarement stériles. La nation allait toujours en se multipliant; et comme les enfants se bornaient à cultiver les champs de leurs pères, au lieu de défricher des terres nouvelles, il s'ensuivait que ces petits héritages ne fournissant pas, dans les meilleures années mêmes, à l'entretien d'un peuple aussi nombreux, les obligeaient à s'expatrier pour trouver ailleurs leur subsistance : de là ces grands débordements de barbares qui inondèrent les Gaules, l'Afrique et même l'empire romain.

Les Germains étaient chasseurs par nécessité, et guerriers par instinct; leur pauvreté rendait les guerres intestines qu'ils se faisaient, courtes, car l'intérêt ne s'en mêlait jamais. Leurs généraux, qui depuis devinrent leurs princes, s'appelaient Fürsten, ce qui est une dérivation du mot de conducteur. Ils étaient renommés par leur taille haute, et pour avoir des corps robustes et endurcis aux travaux les plus pénibles. Leurs vertus principales étaient la valeur, et la fidélité