<96> auparavant, avait été couvert de vaisseaux de toute la terre, que le commerce de la Prusse y attirait. La marche de l'Électeur avec son armée ressemblait au spectacle d'une fête galante et superbe : l'Électrice et toute sa cour étaient avec lui sur des traîneaux; et ce prince était reçu dans tous les endroits où il passait, comme le libérateur de la patrie.

Arrivé à Labiau, il détacha le général Treffenfeldt avec cinq mille chevaux, pour arrêter les Suédois et lui donner le temps de les joindre : il fit le même jour une traite considérable sur le golfe de Courlande, et arriva, le 19 de janvier,a avec son infanterie, à trois milles de Tilse, où les Suédois avaient leur quartier. Il apprit le même jour que Treffenfeldt avait battu deux régiments des ennemis auprès de Splitter, et qu'il leur avait pris vingt-huit drapeaux23 et étendards, deux paires de timbales et sept cents chariots de bagage.

Les Suédois, battus par Treffenfeldt, harcelés par Görtzke, et intimidés par le voisinage de l'Électeur, abandonnèrent Tilse, et se retirèrent du côté de la Courlande. Görtzke atteignit leur arrière-garde, forte de quatorze cents hommes, entre Schulzenkrugb et Coadjuthen, et la défit entièrement.c Il revint d'un côté, et Treffenfeldt de l'autre,


23 Ou les Suédois étaient extrêmement fondus, pour avoir eu tant de drapeaux auprès d'un corps aussi faible, ou il s'est glissé quelque faute de nombre; j'aurais hésité de rapporter ce fait, s'il n'était pas constaté par différentes relations qui se trouvent dans les archives royales. [D'après le rapport fait par le Grand Électeur aux puissances alliées, et daté de Kuckernese, 24 janvier (3 février, nouv. style) 1679, Treffenfeldt détruisit trois régiments de dragons et un de cuirassiers, mais ne prit que huit étendards aux dragons, avec deux cornettes et deux timbales. Le jour même de l'action, le 20 (30, nouv. style) janvier, Treffenfeldt fut promu au grade de général-major.]

a L'Électeur passa la nuit du 19 (29, nouv. style) à Gilge, et n'arriva que le 20 (30, nouv. style) à Kuckernese, à trois milles de Tilse ou Tilsit.

b Il n'existe aucun lieu ni établissement du nom de Schulzenkrug, que donnent toutes les éditions; il faut lire vraisemblablement Schanzenkrug, village qui possède un bac, et situé sur la rive droite de la Gilge, à l'endroit où la Memel se partage pour former la Gilge et la Russe. C'est dans cette direction, qu'arrivant de Tilsit et de Splitter, et longeant ce bras de la Memel, les deux généraux Görtzke et Treffenfeldt poursuivirent les Suédois.

c Le 21 (31, nouv. style) janvier.