<95> de lâcheté : il les dispensa de lui payer les subsides arriérés, leur fit la cession réelle du fort de Schenk, et n'en reçut en récompense que de frivoles garanties, que ces républicains ingrats refusèrent même d'accomplir.

Les Suédois avançaient, en attendant, et faisaient des progrès en Prusse. Ils avaient brûlé en passant le faubourg de Memel, et s'étaient emparés de Tilse et d'Insterbourg; leurs troupes s'étaient étendues, et leurs partis couraient tout le pays.

L'Électeur répara bientôt ces pertes par sa prodigieuse diligence. Le 10 de janviera il part de Berlin, se met à la tête de neuf mille hommes, avec lesquels Derfflinger avait pris les devants; il passe la Vistule le 15,b précédé par la terreur de son nom, qui était devenu redoutable aux Suédois. Horn se confond à son approche; il perd l'espérance de résister au vainqueur de Fehrbellin; il se retire, et ses troupes se découragent. Görtzke profite de ce trouble, le suit, le harcèle, le retarde; et ce commencement de désordre fait perdre huit mille hommes aux Suédois. Un grand nombre de paysans qui s'étaient joints au corps de Görtzke, se jetèrent sur les traîneurs et sur ceux qui s'écartaient de l'armée suédoise, les firent prisonniers ou les massacrèrent.

L'Électeur, qui ne perdait pas ses moments dans l'oisiveté, se trouvait sur les bords du Frisch-Haff; il avait fait préparer des traîneaux, sur lesquels il mitc toute son infanterie et ses troupes dans l'ordre où elles devaient combattre; la cavalerie à leurs côtés suivait l'Électeur, qui faisait de cette façon étrange et nouvelle sept grands milles d'Allemagne par jour : on était surpris de voir cette course de traîneaux d'une armée sur la glace unie d'un golfe qui, deux mois


a Le 30 décembre 1678 (9 janvier 1679, nouveau style).

b L'Électeur passa la Vistule le 10 (20, nouv. style) janvier.

c Le 16 (26, nouv. style), il fit le trajet de Carben à Königsberg; le 18 (28, nouv. style), de Königsberg à Labiau.