<90>Il ne manquait plus que la garantie de la France au traité que le Roi avait fait avec l'électeur de Bavière. On pressait M. de Valori de la procurer : sa cour faisait encore des difficultés sur la cession de la principauté de Glatz, et sur quelques portions de la Haute-Silésie. Il lui arriva, étant auprès du Roi, de laisser tomber par hasard un billet de sa poche : sans faire semblant de rien, le Roi mit le pied dessus;a il congédia le ministre au plus vite. Ce billet était de M. Amelot, secrétaire des affaires étrangères; il portait de n'accorder Glatz et la Haute-Silésie à la Prusse qu'au cas qu'il en résultât un plus grand inconvénient s'il les refusait. Après cette découverte, M. de Valori fut obligé d'en passer par où l'on voulut. Les desseins des Français sur le pays de Hanovre s'ébruitèrent, et parvinrent bientôt au roi d'Angleterre. Ce prince crut son électorat perdu : il n'avait pas le temps de parer ce coup qui le menaçait de si près. Les mesures qu'il avait prises avec la Russie et la Saxe lui ayant également manqué, il voulut tout de bon travailler à moyenner la paix entre le roi de Prusse et la reine de Hongrie. En conséquence de cette résolution, le lord Hyndford se rendit au camp autrichien; de là il fit des remontrances si fortes à la cour de Vienne, il la pressa avec tant d'énergie, en lui exposant que pour sauver le reste de ses États il fallait savoir en perdre à propos une partie, que cette cour consentit à la cession de la Silésie, de la ville de Neisse, et d'une lisière en Haute-Silésie, en renonçant à toute assistance contre ses ennemis.

Le Roi, qui connaissait la duplicité des Anglais et des Autrichiens, prit ces offres pour des piéges. Et pour ne point se laisser amuser par de belles paroles qui l'auraient retenu oisif dans son camp, il déroba une marche à l'ennemi, passa la Neisse à Michelau, et vint le lendemain camper à Kaltecker, tandis qu'un détachement s'empara d'Oppeln, où l'on établit le dépôt des vivres. Sur ces mouvements, M. de Neipperg quitta Neisse, et se porta sur Oppersdorf. Le Roi le tourna par Friedland, et se campa à Steinau. Peut-être que ces différentes manœuvres accélérèrent la négociation du lord Hyndford; il vint avertir le Roi que sa


a Voyez Mémoires des négociations du marquis de Valori. Paris, 1820, t. I, p. 71 et 129.