535. AU MARÉCHAL DE FRANCE COMTE DE BELLE-ISLE A FRANCFORT SUR-LE-MAIN.

Camp de Kalteck, 2 octobre 1741.

Monsieur. Je viens de recevoir une lettre du Cardinal, qui paraît désirer beaucoup que je tienne mes troupes en campagne le plus longtemps possible. J'ai agi jusqu'à présent avec toute la vigueur imaginable, mes troupes sont en campagne le dixième mois, indépendamment de quoi j'agirai encore volontiers avec la même force; mais pour vous ouvrir mon cœur naturellement, il y a quelque points qui me refroidiraient beaucoup, si je n'y voyais pas de changement.

L'un, c'est la lenteur des opérations bavaroises, qui, me laissant porter tout le fardeau de la guerre, ne profitent point de l'absence de l'ennemi pour agir.

L'autre est que, croyant l'électeur de Bavière susceptible de reconnaissance, je me suis vu trompé dans mon attente, par les difficultés qu'il fait de me céder la seigneurie de Glatz. Vous savez que la France n'aurait pas agi sans moi, et que, par conséquent, la conquête du royaume de Bohême, de la Haute-Silésie et des pays de Souabe et de Tirol, n'auraient pas été aussi faciles qu'elles le sont actuellement à l'Électeur. Vous savez que les voix de Mayence, de Saxe, et d'Hanovre lui ont été gagnées par mon assistance. Dans le temps que je devais présumer que la gratitude de ce prince serait la plus vive, je vois qu'il me conteste une misérable seigneurie, à moi qui lui gagne des royaumes, et qui en faveur de sa maison renonce à mes droits sur Juliers et Bergue. Si vous envisagez les choses impartialement, vous trouverez que la conduite qu'on tient envers moi est bien dure, et je vous laisse à juger de ce qui conviendrait à l'Électeur de faire.

Un article que je ne dois pas oublier regarde les quartiers d'hiver; il m'est de toute impossibilité de les prendre autrement qu'en Moravie, et il me semble que mes troupes les ont bien autant mérités que les Saxons, vu nos longues et pénibles opérations.

Quant aux opérations présentes, je dois vous informer que j'ai passé la Neisse, malgré M. de Neipperg, que j'ai rejeté la guerre en Haute-Silésie, et que je ferai ce que je pourrai pour les pousser en Moravie, et de là plus outre.

J'attends sur tous les points ci-dessus mentionnés votre réponse, étant persuadé que vous ne pouvez trouver que très simples, justes et naturelles les choses que je désire.

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Adieu, mon cher Maréchal, je brûle d'envie de vous voir à là tête de ces Français que vous mènerez en maître, au lieu qu'on les conduit actuellement en écolier. L'estime, l'amitié et la considération que j'ai pour vous sont immortelles. Je suis, mon cher Maréchal, votre très fidèle ami

Federic.

Valory, qui est ici, et qui voit tout, vous écrira tout.

Nach Abschrift der Cabinetskanzlei.