6603. A L'ENVOYÉ DE SUÈDE DE CELSING A CONSTANTINOPLE.

Berlin, 18 janvier 1755.

Monsieur l'Envoyé de Celsing. Celui qui a l'honneur de vous remettre la présente, est mon conseiller intime de commerce et chargé de mes affaires, le sieur Charles-Adolphe de Rexin.24-1 Le grand évènement qui vient d'arriver là où vous êtes par le changement de souverain au trône ottoman,24-2 m'a fait prendre la résolution de le faire passer à Constantinople. Il a eu ordre de ma part d'y garder, au commencement, l'incognito et de ne s'adresser qu'à vous seul. Vous m'obligerez donc beaucoup, si, dans la suite et pendant son séjour dans cette ville, vous voulez bien l'assister et l'aider de vos lumières, en lui fournissant les connaissances nécessaires pour faire par vos conseils et par votre assistance les démarches dont je l'ai chargé.

Il arrive tout neuf à Constantinople, et il ignore par conséquent parfaitement le cérémonial et l'étiquette qui s'observe à la cour où vous êtes. Cependant, il apporte des lettres de ma part au Grand-Sultan et<25> à son Grand-Visir. On a été obligé de laisser les noms, dans l'une en partie et dans l'autre entièrement, en blanc, parcequ'on n'en a pas pu avoir ici une juste connaissance. Vous voudrez donc bien suppléer, en cas de besoin, à ce défaut et instruire tout de même le susdit sieur de Rexin si l'enveloppe avec laquelle il faut présenter les lettres en question, doit être de drap d'or ou d'argent etc., et en général de tout ce qu'il faut observer en ces sortes d'occasions par rapport au cérémonial et à l'étiquette établis à la cour ottomane, afin de n'y pas manquer.

L'objet principal de sa mission regarde, d'ailleurs, un essai qu'il doit faire auprès de la Porte pour l'engager à accorder dans ses États le débit de plusieurs marchandises du produit de mon duché de Silésie et particulièrement de la toile de ce pays, et de sonder en même temps le terrain pour la conclusion d'un traité de commerce entre moi et la Porte sur ce sujet.25-1

Je serai fort sensible au secours et à l'assistance que vous voudrez bien lui prêter encore en cette occasion. Mais, comme de pareilles propositions demandent absolument le secret, je vous prie de le garder de votre côté et de ne vous en ouvrir à personne, afin qu'étant éventé, et les ministres de puissances étrangères à Constantinople informés de cette négociation, ceux-ci ne tâchassent de la traverser par leurs insinuations.

L'étroite union qui subsiste entre moi et le roi et la couronne de Suède, ne me fait pas douter un moment que vous ne soyez entièrement porté à vous rendre, sur tout ce que dessus, à mes désirs. Vous sentirez, au surplus, vous même que dans tout ce que le sieur de Rexin fera, il n'y aura rien qui pût déplaire, le moins du monde, à votre cour et qui ne fût pas entièrement conforme à ses intentions et à ses intérêts.

Je vous saurai un gré particulier des bons offices que vous voudrez bien employer en faveur dudit sieur de Rexin, et vous pouvez compter que je saisirai à mon tour les occasions avec plaisir où je pourrai vous donner des marques réelles de l'estime que j'ai pour vous.

Federic.

Nach dem Concept.



24-1 Vergl. S. 21.

24-2 Vergl. S. 13.

25-1 Vergl. S. 16.