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Pour ce qui regarde les doléances que M. de Rouillé vous a fait marquer sur ce que le duc de Nivernois m'avait fait le dépositaire des pensées les plus secrètes du Roi son maître, vous pouvez bien lui dire que le duc de Nivernois ne m'avait rien communiqué dont je n'avais pas été informé depuis assez de temps, dont, malgré cela, je n'avais fait et ne ferais de ma vie un mauvais usage, et que je me flattais au surplus qu'on ne voudrait pas m'attribuer une façon de penser aussi indigne que celle-là. Dans la rage présente où M. de Rouillé se trouve, je sais bien que tout ceci opèrera peu sur son esprit, cependant il sera toujours bon que vous tâchiez de le calmer.

Au surplus, ce qui peut vous servir de baromètre pour pénétrer au juste les intentions des ministres, c'est que vous observerez si, après que le dernier courrier1 du duc de Nivernois est arrivé, ledit ministère continuera toujours dans la même fougue et de s'exprimer avec emportement; car si, après l'arrivée dudit courrier, le calme ne se retrouve pas et que les hauteurs continuent, dans ce cas-là il est très nécessaire que vous notiez tout, afin de m'en instruire bien et à temps, et que même vous me dépêchiez un exprès en courrier, supposé que vous trouviez les choses d'assez d'importance que vous aurez à me mander, afin qu'elles parviennent bientôt à ma notice.

Ce serait un évènement assez singulier pour moi, si les ministres de France voulaient supporter bien patiemment toutes les insultes et affronts que leurs ennemis déclarés leur font, et qu'ils voulussent au contraire s'irriter et s'aigrir sur la démarche la plus innocente que j'ai faite. Au reste, de chercher le consentement des liaisons qu'on prend, c'est que l'on peut bien prétendre de ceux qui nous sont liés en vassaux, mais non pas de souverains.

Federic.

Nach dem Concept.


7268. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A VIENNE.

Potsdam, 14 février 1756.

J'ai reçu votre rapport du 4 de ce mois et ne doute pas que mes deux dépêches par lesquelles je vous ai instruit sur la façon dont vous devez vous expliquer relativement à ma convention de neutralité de l'Allemagne, faite avec l'Angleterre, ne vous soient arrivées avant celle-ci.2

Je ne veux point vous laisser ignorer que, selon mes lettres de France,3 le ministère là a marqué beaucoup d'humeur, dès que la nouvelle de cette convention lui est arrivée, et qu'on m'ajoute que du depuis le comte de Starhemberg a eu de fréquentes et longues conférences avec le sieur Rouillé qui ont fait soupçonner qu'il était question de



1 Vergl. S. 68.

2 Vergl. Nr. 7232. 7247.

3 Vergl. Nr. 7267.