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comme on le soupçonne en suite d un paquet de lettres que l'on sait avoir passé à la Haye, adressé au marquis de Bonnac de la part du vice-chancelier de Russie, et que la France vienne à offrir à la Czarine des subsides considérables, on est bien déterminé ici d'aller au delà de toutes les offres qu'on pourrait lui faire; les ministres seraient soutenus dans une telle démarche par la nation, et celle-ci ouvrirait avec empressement les cordons de la bourse pour cet effet.“

nouvelle d'un nouveau phénomène politique, savoir d'un chipotage entre la France et la Russie, et que d'ailleurs le comte Golowkin, ministre de Russie à la Haye, avait reçu ordre de sa cour de vivre dorénavant en bonne harmonie et en plus grande liaison avec les ministres de France1 — qui2 d'abord était aussi allé voir [le comte Bonnac] jusques à trois fois, où entre autres il lui, le comte Bonnac, avait remis un paquet pour le sieur Rouillé — j'ai cru nécessaire de vous avertir de cette circonstance, dont apparemment aussi les ministres anglais seront déjà informés par le sieur Yorke, et vous ordonner de parler sur ce sujet à ces ministres et de leur dire de ma part qu'après ce nouvel évènement il ne resterait au roi d'Angleterre et à moi que de former entre nous un concert solide, pour obvier à un mal qui, pourvu qu'on n'y prît pas toute l'attention possible et n'employât pas d'abord les mesures nécessaires, saurait avoir des suites assez funestes. Qu'avant que d'entrer en matière là-dessus, j'assurais le roi d'Angleterre que, quel train que ces affaires sauraient prendre, il saurait compter que je remplirais fidèlement les engagements que j'avais pris avec lui, quoi qu'il en arrive. Que cependant, en combinant ces nouvelles de la Haye avec la mission de l'émissaire Douglas et les liaisons que les cours de Vienne et de Versailles venaient de prendre ensemble, je croyais avoir lieu d'en tirer la conséquence que ces deux cours étaient convenues entre elles d'entraîner la Russie pour faire cause commune avec elles dans la conjoncture présente, et que je commençais à croire que la cour de Vienne n'aurait pas signé la convention avec la France, si elle ne se croyait pas assurée de l'accession de la Russie, et que c'était la raison pourquoi elle s'était expliquée envers le sieur de Keith d'une façon extraordinaire et peu décente,3 et que d'ailleurs cette cour ne voudrait rendre publique sa convention faite avec la France, avant que de savoir si la France parviendra à être d'accord avec la Russie.

Parmi ces circonstances donc, je croyais que le point principal serait que l'Angleterre ne perdît plus aucun temps — tout comme vous me marquez que le Roi en a déjà pris la résolution de faire — pour employer tous efforts afin de détourner la Russie de pareils engagements et de la retenir plutôt dans ceux qu'elle a contractés [avec] l'Angleterre; mais que, dans le cas que la cour de Pétersbourg se fût déjà trop avancée avec la France et l'Autriche, de sorte qu'on ne saurait plus l'en faire revirer, et qu'elle eût abandonné l'Angleterre, il faudrait



1 Bonnac und Affry.

2 Golowkin.

3 Vergl. S. 362.