<594> séparés si longtemps. Cependant, j'ai quelque petit pressentiment que nous pourrions bien nous revoir quelque part aux environs de Dresde.

Federic.

Nach der Ausfertigung im British Museum zu London.


11535. AU MINISTRE DE LA GRANDE-BRETAGNE MITCHELL A STREHLA.

Sophienthal, 13 octobre 1759.

Je remarque deux choses dans la lettre de M. Keith : beaucoup d'orgueil et cependant une envie secrète de faire la paix de la part des Russes.

Pour que vous ayez une connexion de tout ceci, il faut que vous sachiez que, par des lettres de Vienne, de Pétersbourg et de Varsovie, j'ai appris à peu près dans l'intervalle [de trois mois],1 c'est-à-dire depuis l'époque de la bataille de Minden, que les Français sont dégoûtés de la guerre, que l'épuisement de leurs finances, le dérangement de leur commerce, le malheur de leurs armes sur terre et sur mer, la perte du Canada, à laquelle ils s'attendent incessamment, et peut-être l'envie secrète qu'ils portent aux prospérités de la Russie,2 que toutes ces raisons jointes ensemble, si vous y ajoutez encore la mort du roi d'Espagne,3 leur font désirer la paix avec autant d'empressement qu'ils ont témoigné de l'ardeur pour la guerre.

Cette disposition de la France, qui est connue des cours de Vienne, Pétersbourg et Varsovie, les jette dans de grands embarras, et il se pourrait bien que le comte Woronzow eût dessein de prévenir la France, pour faire jouer à l'impératrice de Russie le rôle de médiatrice, et peut-être de garante de la paix; ce qui lui donnerait dans la suite la même influence dans les affaires d'Allemagne que la France se l'est attribuée jusqu'ici sous prétexte de la garantie de la paix de Westphalie.

Cette négociation me paraît donc par là même trop dangereuse pour que je voulusse m'y engager. Il serait plus convenable que la paix se traite de concert avec les Anglais et moi. Non seulement nous nous rendons plus respectables en demeurant fermement attachés ensemble, mais c'est aussi le seul moyen de nous faire obtenir de bonnes conditions de nos ennemis.

Je crois cependant que M. Keith ne ferait pas mal de faire mieux expliquer sa pensée à M. Woronzow. Ce ne sont que des propos vagues qu'il lui a tenus jusqu'ici, et il faudrait tâcher de faire parler ce Chancelier, pour savoir ce qu'il entend par la paix; si c'est que la Russie la veut faire seule, à la bonne heure; mais à quelles conditions : car quant à la médiation, elle ne saurait y prétendre en qualité de partie belligérante. M. Keith ne ferait pas mal d'insinuer adroitement là-bas qu'il ne tient qu'à nous de faire une paix séparée avec la France.



1 Ergänzt nach dem Concept.

2 Vergl. S. 555. 578.

3 Vergl. S. 77. Anm. 3.