12606. AU FELD-MARÉCHAL PRINCE FERDINAND DE BRUNSWICK.

Leipzig, 26 décembre 1760.

Je viens de recevoir la lettre que Votre Altesse m'a faite du 23 de ce mois. Sans que je veuille entrer dans aucune discussion de ce qu'elle comprend,165-1 je crois que le meilleur à faire pour nous sera d'oublier tout ce qui s'est passé à cet égard, et de ne songer à présent qu'à ce que nous convient de faire actuellement pour le bien de la cause commune. C'est principalement à ce que Votre Altesse songe sérieusement à préparer tout, afin de mettre en exécution votre plan projeté, aussitôt que la saison voudra, tant soit peu, le permettre, pour rejeter et chasser de la Hesse les Français avec les troupes saxonnes.

Entre d'autres motifs à cela il y en a un qui mérite bien d'être pris en considération et que je ne veux pas vous dissimuler : c'est que je sais de bonne part que le ministère britannique penche fort pour entrer en négociation de paix avec la France. Comme la cour de Versailles désire la paix également, qu'elle veut faire cependant à des con<166>ditions les moins onéreuses, elle s'est avisée, même contre le sentiment de M. de Broglie, de vouloir maintenir la Hesse, pour s'en servir entre autres d'équivalent contre quelques-unes des principales conquêtes que les Anglais ont faites durant la présente guerre sur les Français dans l'Amérique et aux Indes. Si donc ceux-ci maintiennent la Hesse, il ne saurait manquer qu'ils n'en retirent l'avantage de pouvoir traîner au long la négociation que les Anglais voudraient bientôt entamer et finir avec eux, et [que] ceux-là, restant en possession de ce prétendu équivalent, [rendront] difficile et épineuse, au lieu que, si Votre Altesse poussera Son entreprise et les chassera de la Hesse, en leur portant en même temps de bons coups, il ne faut plus douter que les Français se tiendront là ; et, dégoûtés de la guerre, ils prêteront avec d'autant plus de facilité les mains à une pacification honorable et avantageuse à la couronne de la Grande-Bretagne.

Voilà, je crois, un motif particulier pourquoi vous devez faire tous vos efforts possibles pour chasser les Français de la Hesse, avec tout ce qui y est joint de Saxons, et les rejeter d'une façon sensible à eux, afin de procurer l'avantage susdit à la cause commune.

Federic.

Nach der Ausfertigung im Kriegsarchiv des Königl. Grossen Generalstabs zu Berlin.



165-1 Der Prinz hatte sich gegen die Vorwürfe des Königs vertheidigt, „de ne m'être concerté . . avec Elle sur rien concernant mes opérations, ni de ne L'avoir seulement pas averti de mes mouvements rétrogradifs“ . Vergl. S. 159.