<65> des voix, égalise les suffrages des puissants et des faibles et ne laisse de prérogative qu'au nombre.

L'intimité qu'a la politique avec les opérations de guerre, m'oblige d'entrer dans le détail qui la regarde, et de faire marcher d'un pas égal le général et le négociateur, le conquérant et le corrupteur.

Des huit voix qui composent le collége électoral, la France n'a que trois, et les Anglais, non contents de leur supériorité actuelle, veulent y mettre le comble, en procurant l'activité à la voix de Bohême; c'est, dans ce moment, le plus grand mal à craindre, et qui demande le plus prompt remède. La France peut se le procurer, en mettant l'armée que le maréchal de Maillebois commande, à 60,000 hommes effectifs, en portant cette armée en avant et dans une position où elle coupe la communication des Hanovriens avec les trois Électeurs ecclésiastiques. Une position pareille est favorable aux négociateurs, et s'ils sont en même temps secondés par une pluie de Danaé qui tombe en abondance sur les terrains les plus stériles, la France peut se promettre de gagner à coup sûr ou Monsieur de Trêves ou Monsieur de Cologne.

L'usage de cette armée ne se borne pas à ce seul objet, elle en embrasse de plus importants encore. Pour bien faire, le maréchal de Maillebois devrait avoir un ordre illimité d'attaquer les alliés, dès qu'il le pourrait avec avantage. S'il bat les alliés, comme sa supériorité paraît l'annoncer, la France est maîtresse de l'élection d'un empereur à son choix, et s'il se renferme à se maintenir dans sa position, du moins traîne-t-il l'élection impériale et met-il un empêchement aux desseins de ceux qui voudraient la brusquer dans un temps où les conjonctures les favorisent.

Supposons pour un moment que le maréchal de Maillebois se vît contraint de continuer sa retraite, et que les alliés le rejettent derrière le Main ; alors l'électeur de Mayence, qui se verra soutenu par les alliés, tiendra un langage plus fort; il joindra ses troupes à celles des alliés, il y entraînera d'autres. L'électeur de Cologne sera confirmé dans ses sentiments, les cercles de Westphalie et Franconie se déclareront ouvertement contre la France, les confédérés de Francfort seront regardés comme des perturbateurs du repos public, le pays de Hesse sera ruiné, et peut-être le souverain, ainsi que le Palatin, dans la nécessité de retirer leurs troupes de la Bavière. Je demande quel sera le monarque qui dans une conjoncture pareille pourra arrêter l'élection du Grand-Duc? Et les malheurs des conséquences ne pourront s'attribuer à autre chose qu'au vice du principe.

Je passe aux opérations qui regardent l'armée française en Bavière et l'année prussienne en Silésie. On ne peut jusqu'à présent asseoir un plan d'opérations que sur le pied actuel où sont les choses. Le roi de Prusse contient un corps de 50,000 Autrichiens et de 20,000 Saxons, Il n'est point sûr que les Saxons ne l'attaquent pas dans ses États, ce qui l'oblige en premier lieu à avoir continuellement un œil attentif sur