<68> intérêts des parties contractantes. Que milord Chesterfield raisonne parfaitement bien, en supposant qu'il n'y a que l'Angleterre au monde; mais que je le prie de penser que ce raisonnement, tout bon qu'il pourrait être pour un Anglais, n'est pas si évident pour un Prussien; que lord Chesterfield n'étant pas autant intéressé que moi à la conservation de la Silésie et au rôle qu'il me convient de jouer en qualité d'un des principaux électeurs d'Allemagne, ne sent pas la différence très réelle qui se trouve pour moi entre un empereur qui réside à Vienne ou un empereur qui réside en tout autre endroit de l'Allemagne; qu'il n'y a aucune loi dans l'Empire par laquelle la dignité impériale doit être héréditaire dans une maison; que, bien loin de là, cette dignité est élective et par conséquent devrait changer d'une maison à l'autre.

Que dans toutes les affaires du monde, il faut un avantage réciproque; que, Dieu merci, je ne me vois pas obligé à demander la paix à genoux, et je compterais d'avoir fait un très mauvais marché que de mettre la couronne impériale sur la tête du duc de Lorraine, pour me procurer simplement la paix sans d'autres avantages; que je me trouve encore en situation de faire plus de mal à la reine de Hongrie qu'elle ne le pense, et qu'une première campagne infructueuse ne décide en rien du succès de la suivante; que si j'avais fait des fautes, je les réparerais, et que par conséquent la cour de Vienne, loin d'avoir rien gagné l'année passée, a peut-être tout à appréhender celle-ci. Que si j'avais maintenant des dispositions pour renouer mes anciennes liaisons avec l'Angleterre, il fallait que ce fût toujours sur le principe que nous y puissions trouver nos avantages mutuels; qu'il y a des moyens pour concilier les intérêts réciproques, et que certainement, si l'Angleterre en avait bien envie, l'affaire ne pouvait pas manquer de réussir; que ce n'était pas la nécessité qui m'obligeait de faire des avances, mais le désir sincère de rétablir la paix et la tranquillité en Allemagne; que la mort de l'Empereur, finissant les engagements que j'avais avec la France, me mettait en quelque façon en liberté de prendre telles mesures que bon me semble; que l'on pourrait sûrement compter sur ma fermeté, dès qu'on aura pu convenir des conditions justes et raisonnables à mon égard, où je puisse trouver en même temps mes sûretés et mes intérêts; car, à la paix de Breslau, milord Carteret m'avait dupé d'un grand morceau de la Haute-Silésie. Que l'Angleterre n'avait jamais voulu engager ni la Hollande ni la Russie à me garantir la Silésie; que ce procédé, quoi qu'on en puisse dire, n'était pas honnête, et qu'en commençant par de mauvais procédés le jour d'un accommodement, il n'était pas étonnant que les suites en ont été telles qu'on les a vues. Que je ne sais pas de quelle façon on pense en Angleterre sur mon sujet, ni quels desseins on peut y avoir tant sur l'Allemagne que sur l'Empire en général, et peut-être même quel venin on y nourrit contre moi; mais que je les avertis que, s'ils ne faisaient pas usage