<313> de l'accomplissement du traité de paix de sa part, m'avaient fait voir clairement que sa disposition envers moi n'était nullement sincère, et qu'aussi souvent que j'avais été à rechercher les garanties stipulées dans le traité de notre paix, la reine de Hongrie les avait fait manquer ou les avait empêchées tant qu'elle avait pu; que milord Chesterfield pouvait juger jusqu'où avait été la bonté de mes intentions, puisque j'avais fait avoir des quartiers d'hiver à quelques régiments des troupes autrichiennes dans le pays de l'Électeur palatin, et que dans toutes les affaires de l'Empire je n'avais rien mis dans leur chemin.

Après tant de mauvaise volonté de la cour de Vienne, il avait été bien juste que j'eusse pris mes mesures là-contre, et que je cherche des amis où j'en puis trouver.

L'Angleterre, quelle raison a-t-elle d'être fâchée de ce que je fais une alliance défensive avec la Suède? et quel mal lui en peut-il résulter? Je croirais d'ailleurs que, si les Anglais avaient mes intérêts bien à cœur, ils seraient bien aise de voir affermir ma situation par de bonnes alliances, et qu'ils ne m'envieraient pas un avantage aussi frivole que celui-là.

Que pour ce qui regarde la Saxe, je n'avais pas contribué directement au mariage de la Dauphine; qu'on avait eu des vues en France sur ma sœur cadette, et que, sur cela, j'avais insinué aux Français que, si l'on voulait avoir une princesse d'Allemagne pour la marier au Dauphin, une princesse de Saxe leur conviendrait mieux, à tous égards; que d'ailleurs ce mariage de la Saxe n'était qu'un arrangement de famille pour le roi de Pologne, et que j'avais été bien aise de lui donner cette marque-là de mon amitié, pour que ce fût une espèce d'emplâtre qui le guérît des coups passés. Qu'au surplus j'avouais naturellement à lui, milord Chesterfield, que j'aimerais mieux que les Saxons fussent en alliance avec la France qu'avec la reine de Hongrie, et que j'avais vu de quoi ils étaient capables, quand ils étaient liés avec la reine de Hongrie; et comme je ne demandais que d'être en paix avec tous mes voisins, j'avais plus de confiance de pouvoir la conserver avec les Saxons sur ce pied-là que d'une autre façon.

Que j'étais persuadé qu'un ministre aussi éclairé que lui aurait pénétré d'avance toutes ces raisons-là; que je me conduisais aussi conséquemment que je pouvais selon mes intérêts, et qu'il n'y avait rien de plus naturel dans le monde que de se lier avec les ennemis de nos ennemis; que j'étais fort obligé à milord Chesterfield de la confidence qu'il m'avait faite des discours prétendus des ministres de France, mais que, comme une confidence valait l'autre, je lui disais naturellement tout ce qui m'était revenu par de différents endroits, quoique je pusse l'assurer en même temps que je n'y avais pas ajouté foi : que beaucoup de gens prétendaient de savoir que de grosses sommes d'argent avaient été envoyées de l'Angleterre à Pétersbourg, pour faire faire ces ostentations de l'année passée aux troupes russiennes; qu'on disait dans le monde