2724. AU CONSEILLER ANDRIÉ A LONDRES.

Potsdam, 29 juillet 1747.

Mon ministre à la cour de Vienne, le comte de Podewils, m'ayant mandé qu'à la fin le baron de Bussche venait de recevoir des ordres de la régence d'Hanovre, par rapport à la garantie de l'Empire du traité de Dresde,448-2 par lesquels on lui ordonnait d'appuyer cette affaire auprès de la cour de Vienne, en lui faisant en même temps une espèce de reproche de n'avoir pas exécuté ceux qu'on lui avait donnés sur cette matière, il y a près d'un an — j'ai bien voulu vous en faire part, afin que vous en puissiez remercier de ma part milord Chesterfield, dont je suis persuadé que c'est lui principalement à qui j'en ai toute l'obligation.

Je veux bien vous dire encore à cette occasion — quoique sous le sceau du secret le plus absolu et avec défense expresse de n'en parler qu'au seul milord Chesterfield, à qui je veux bien confier mon secret — qu'à l'occasion dudit ordre j'ai été informé confidemment, par un ami secret que j'ai à Vienne, que, depuis que l'ordre de la régence<449> d'Hanovre était arrivé au baron de Bussche, et que la cour de Vienne en avait eu vent, elle avait été extrêmement piquée contre milord Chesterfield, mettant uniquement à sa charge que cet ordre ait été expédié; qu'elle avait pris en conséquence la résolution d'instruire son ministre à Londres, le sieur de Wasner, de tâcher par tous les moyens possibles de faire soupçonner milord Chesterfield, tant au roi d'Angleterre qu'au Parlement, comme s'il penchait trop pour moi et pour mes intérêts et qu'il me favorisait autant, jusqu'à me faire des ouvertures sur des affaires les plus secrètes, que je ne laissais pas de trahir alors à la France; que d'ailleurs le sieur de Wasner ne devait perdre aucune occasion qui se présentât, pour noircir toutes les démarches que je faisais, et qu'il devrait inspirer au roi de la Grande-Bretagne, au Parlement et aux principaux de la nation toute la jalousie possible contre moi, en m'attribuant des vues fort dangereuses, des liaisons secrètes avec la France et des vues très préjudiciables aux Puissances maritimes et surtout encore à l'électorat d'Hanovre; mais qu'il devrait surtout peindre l'alliance que j'avais faite avec la Suède comme de conséquences très dangereuses; que, pour colorer de pareilles insinuations, il devrait se servir du biais de dire que sa cour avait eu moyen d'intercepter quelques lettres qui mettaient assez en son jour tout le péril éminent de mes vues, et combien il était donc nécessaire de bien s'unir contre moi avec la cour de Vienne. Que j'avais cru nécessaire de communiquer tous ces avis à milord Chesterfield, me reposant d'ailleurs sur sa probité qu'il voudrait bien me garder le secret là-dessus et n'en faire autre usage que pour sa direction seule; mais pour qu'il fût d'autant plus convaincu de la réalité de ces avis, il n'aurait qu'à s'entretenir un jour avec le ministre autrichien sur mon sujet et à faire semblant comme s'il ne pensait pas mal de moi, et qu'il serait convaincu alors de la vérité de tout ce que je venais de lui communiquer en confidence.

Quant à vous, je veux que vous agissiez avec toute la dextérité dont vous êtes capable, lorsque vous ferez les insinuations susdites à milord Chesterfield, et que vous tâchiez surtout à me faire garder le secret là-dessus, en conséquence de quoi vous ne devez faire votre relation de ce que ledit lord vous a répondu à ce sujet, qu'à moi seul, sans envoyer des doubles à ma cour.

Federic.

Nach dem Concept.



448-2 Vergl. S. 259 Anm. 1.